Aubier-Dunne, tiens pourquoi ? Vrai qu’il y a dans l’histoire de la moto française des sujets qui paraissent plus passionnants que ce constructeur du nord spécialisé dans les moteurs deux-temps de petite et moyenne cylindrée. Surprise ! J’ai ouvert le tiroir par pur hasard pour répondre aux questions d’un lecteur et j’ai découvert un monde caché, révélé en particulier par un brouillon d’article manuscrit de Roger Brioult directeur de la célèbre Revue Technique Motocycliste. Et plus je piochais dans mes archives, plus Aubier-Dunne m’apparaissait sous un tout autre jour, celui d’une marque de passionnés qui faisait de l’utilitaire pour vivre tout en rêvant de projets plus grandioses.
Roger Brioult raconte : « En 1917, au moment de l’arrivée des alliés France, le soldat Dunne, américain et motoriste, s’enamourache d’une jeune fille de Saint-Amand-les-Eaux, mademoiselle Aubier dont père est mécanicien-garagiste dans cette même ville.
La guerre se termine, et Dunne décide de rester en France d’autant plus volontiers qu’il s’entend très bien avec Georges, le père de sa dulcinée… qui devient d’ailleurs son beau-père et son associé. Ainsi naît la société Aubier-Dunne dont le premier bébé est un petit 65 cm3 deux-temps destiné à motoriser des bicyclettes. La course étonnamment longue du piston (35 mm d’alésage pour 65 mm de course) a conduit ses inventeurs à réaliser des lumières divisées verticalement par deux barrettes formant ainsi trois orifices en forme de fenêtre gothique ».
Cette caractéristique du très longue course se perpétue sur les Aubier-Dunne deux temps. Le 175 cm3 à distributeur rotatif présenté au salon 1929 a lui aussi une course démesurée (51 x 85 mm). À ce même salon de 1929, Aubier-Dunne, qui n’a produit que des deux temps depuis 1926, annonce de belle manière son ambition et son intérêt pour le quatre temps et des moteurs de plus grosse cylindrée en présentant sur son stand un modernissime 500 cm3 bicylindre en long calé à 360°dont les soupapes sont actionnées par un arbre à cames en tête. Les deux cylindres coulés en un seul bloc sont chemisés et en aluminium comme la culasse, les soupapes sont verticales et commandées directement par un simple ACT entraîné par chaîne en bain d’huile. Le graissage est sous pression, l’embrayage fonctionne à sec et la boîte de vitesses à trois rapports se boulonne à l’arrière du moteur. L’usine annonce une transmission par chaîne ou par arbre au choix. Ce beau projet ne verra malheureusement jamais le jour et à peine Moto Revue lui consacrera-t-il quelques lignes éparses et un petit dessin. Dame, Aubier Dunne n’y fait plus de publicité… alors !
« Nombre de prototypes de toute puissance sont par la suite développés et une trentaine d’entre eux étaient encore visibles lors de ma visite en décembre 1949. » continue Roger Brioult « Presque tous étaient des deux temps du mono au 4 cylindres, à refroidissement par air ou par eau avec des cylindrées de 60 à 2000 cm3. Certains étaient pour le moins curieux, et la plupart destinés à équiper des avions légers. C’est à ce moment qu’un certain Mignet, féru d’aviation légère, crée un avion monoplace (puis biplace) destiné très vite à être vendu en pièces détachées à des pilotes ingénieux et adroits comme cela se faisait depuis des années aux États-Unis. Les divers prototypes conçus par Mignet font preuve d’une grande originalité. Ce ne sont ni des monoplans ni des biplans, mais un peu des deux ! L’aile de grande surface est située tout à l’avant avec, au-dessous et en arrière, une deuxième aile un peu moins large. Le passage d’air est réglable par le pilote en s’inclinant plus au moins le plan mobile. Vous l’avez deviné le moteur choisi par Mignet est un Aubier-Dunne à deuxcylindres ». Celui-là même qu’on retrouve en 1938 sur une motochenille Mercier. Ce curieux moteur, alors l’un des rarissimes deux temps pour l’aviation, a des cylindres disposés tête en bas, disposition relativement courante en aéronautique. Il est disponible en versions Channel bicylindre de 540 cm3 (70 x 70 mm), 20 ch/4000 tr/min et 38,5 kg complet ou Jaguar tricylindre de 27 ch/3200 tr/min et 53 kg. « Le kit est vendu avec toutes les indications pour la construction de ce mini avion bientôt baptisé le pou-du-ciel. Le succès est colossal et les acheteurs n’hésitent pas à construire leur pou-du-ciel dans leurs garage, grange ou écurie voire pour certains dans leur salle de séjour. C’est le bricolage total et quelques-uns réussissent à faire voler leur avion plutôt correctement. Pourtant, bien que Mignet ne manque pas de faire remarquer que la qualité et les dimensions de toutes les pièces prévues doivent être impérativement respectées, beaucoup trop de clients improvisent et modifient. Les conséquences seront souvent dramatiques sinon fatales, tant et si bien que des réglementations sévères finissent par tuer ces Poux pourtant fort sympathiques. Dunne et son beau-père Aubier sont entre-temps repartis en Amérique, mais la société continue ses activités, la disparition des Poux étant compensée par une forte augmentation de la production de moteurs pour vélomoteurs et motos de moyenne cylindrée.
Je me souviens, » continue Roger Brioult « avoir vu des ateliers en pleine effervescence avec une production qui passa de 150 moteurs/jour en 1948 à plus de 200 en 1950 rien que pour la catégorie des 125 cm3. Il est également construit un petit moteur de 100 cm3 qui peut être accouplé à une boîte de vitesses et en statique ou sur des motoculteurs (MABEC) et un petit bloc-moteur à deux vitesses ayant la même culasse et le même cylindre, mais piston, bielle et carters différents. Il équipera les tandems Narcisse, et des MR (Mandille et Roux) à petites roues. Le 125 cm3 (et un 175 en 1954) sera quant à lui monté par Automoto, et, sur des scooters, par la SICRAF (Paul Vallée), Guiller et AGF (en version 100 cm³ trois vitesses). En 1950 on m’a même montré les plans complets d’un futur 125 cm3 quatre temps à culbuteurs très moderne qui devait être construit en 1936… » et qui resta un rêve comme le 500 de 1929 .
Faute des quatre temps promis, la production reprend après-guerre avec des deux temps utilitaires fiables, mais peu enthousiasmants : le 100 K (49 x 52 mm) suivi du s 125 AL puis AM (51 x 60 mm) qui reprend le même dessin. La principale originalité réside dans le chemisage en acier des cylindres en alliage léger, une technique utilisée par Aubier-Dunne depuis ses débuts. Fin 1952 est présenté un tout nouveau moteur type 125 R qui sera décliné en version RS et 175 TS (60 x 60 mm). Aubier-Dunne qui a déjà fusionné avec la CLM (Compagnie Lilloise de Moteurs) une filiale de Peugeot a pour principal client Automoto qui remplace progressivement ses moteurs par des Peugeot. La marque de Saint-Amand-les-Eaux finira par être totalement absorbée et, l’ogre Peugeot, fidèle à ses habitude d’alors, en effacera toute traces comme il l’a fait avec Terrot et bien d’autres. La trentaine de moteurs d’études conservés à Saint-Amand-les-Eaux disparaîtront sans laisser d’adresse, mais qui sait le beau bicylindre à ACT ressortira peut-être un jour.
Liste non exhaustive des BMA, scooters et motos motorisés par Aubier-Dunne. AGF (scooter 100-3vit), Automoto, Charles Gérald 250 CL, Dresch, Guiller pour son scooter SIM de 1953, Hirondelle à la Manu de Saint-Étienne), Libéria, Mercier sur une étonnante moto à chenilles en 1938, Motobloc (RSI), Narcisse sur un tandem, New-Map en 1927 (après Madoz et avant Zürcher), Paul Vallée, Prester pour des 100 cm3 en 1936-37 et une mystérieuse 250 à boîte Albion avec sélecteur dont le moteur aurait été dessiné par Remondini , information non confirmée, Propul’Cycle, Royal Sport, SIC, Socvel sur son scooter Stefa 125 de 1952 et Utilia, la maison Corbeau, en 1930.
Bonjour à tous
je possède une BMA type A2 de 1932 cadre col de cygne à moteur aubier et dunne ,je cherche toutes personnes
ayant ce type de BMA pour des infos à échanger
merci
Bernard 0683538807
Bonjour,
J’ai acquis, il y a quelques mois déjà, une BMA PRESTER modèle ecclésiastique, identifiée des années 36-37.
Son moteur est un Aubier & Dunne 100cc de type DX, sur lequel il me manque le carburateur. Il devrait s’agir d’un carbu de marque AMAC modèle T41/12.
Comme je frappe à toutes les portes, je vous laisse ce petit message en espérant qu’il soit relayé.
Bien cordialement,
Thierry PARENT
Merci pour ce lien que je recommande à tous pour plus d’info sur le bicylindre Aubier-Dunne des Poux du ciel.
Et aussi en aviation !!
http://pouguide.org/moteur-aubier-dune.html
Beaucoup de choses comme on pouvait le voir au dernier salon de Lyon et on a trop tendance à oublier que la France reste, je crois, le troisième producteur de moto européen derrière l’Allemagne et l’Italie grâce en particulier à l’usine MBK qui fabrique la quasi totalité des scooters Yamaha et des motos jusqu’à 700 cm3.
La France a un passé particulièrement riche . Que reste t il aujourd’hui ?
en 1927 le cours de la livre anglaise étant au plus haut le fabricant belge Bovy proposa des motos équipées de moteur Aubier-Dunne en 2t et Anzani en 4t.
Les moteurs Aubier Dunne d’après guerre était de très bonne qualité, agréables à travailler….mais quelles veaux!
Mon copain qui avait récupéré une Automoto vraiment en bon état, se faisait doubler par
les Mobylette bleues.
Et la 125 Peugeot a continué à se faire tourner autour par les 125 Terrot , Motobécane et
autres Gnôme, même si c’était une des plus solide du lot.