Charron 1927 : moto de bois et moteur Voisin

Au Top Mountain Museum, une moto est mise à l’honneur chaque mois et il s’agit en Avril, d’une réalisation française pour le moins originale, La Charron de 1927 (mal datée de 1933) où cadre, fourche avant et accessoires sont entièrement réalisés en bois. Quelle meilleure place pouvait trouver cette Charron que dans un musée, lui aussi entièrement construit dans le même matériau ! Cerise sur le gâteau, cette Charron est animée par un rarissime moteur Voisin qui n’est pas dû à Gabriel, mais à un Voisin d’à côté et sans aucun rapport qui, lui, se prénomme René-Albert.

Photos Top Mountain Museum sauf mention contraire

Le créateur, Jean-Paul Charron, charpentier de profession, rêvait depuis longtemps d’une moto, mais sans en avoir les moyens de se la payer. Son nom était prédestiné, un maître charron était par définition spécialiste du bois et du métal. Pas de problème, il décide de se la construire lui-même en utilisant ses connaissances et son matériau usuel, le bois. Il choisit le noyer qui lui semble réunir les qualités requises en résistance et stabilité dans le temps. Quelques additifs métalliques indispensables sont rajoutés à cette partie cycle ligneuse : un moteur Voisin 350 cm3 à soupapes latérales, une boîte Picard 3 vitesses et des réservoirs d’essence et d’huile faits main comme le cadre.

Et ça marche car il se dit que la Charron en bois roula jusqu’en 1961 !

La guidon bois s'est vu renforcé d'un manchon métallique après une infortunée rencontre avec une 4CV.
Evidemment, une magnéto MEA, car elle ne coule pas !
Le propriétaire expose son kit d'entretien !
Carter de chaîne primaire et garde-boue, tout est en bois.

Tout étonne sur cette moto. Le moteur Voisin pour commencer avec sa culasse à deux étages (voir encadré).

La boîte de vitesse à 3 rapports par levier direct est une rare Picard semblable à celle montée sur les Motobécane 308 de la fin des années 20 (sur cette Charron on aurait évidemment préféré une Bridier-Charron !).

Le réservoir d’essence est en deux parties avec entre les deux un coffre pour les outils.

Le graissage est à huile perdue et si le réservoir d'huile est en tôle, son bouchon est, comme le reste, un bout d'arbre.
Photographiée il y a de nombreuses années par Jean Bourdache.

 L’autre Voisin

Le moteur Voisin qui équipe la Charron a été produit de 1927 à 1929 par la S.A des Ets. Voisin et Cie fondés par René Albert Voisin, sise à Levallois-Perret, rue Antonin Raynaud et qui n’a aucun rapport avec Gabriel Voisin et ses différentes réalisations pour l’aéronautique ou ses projets pour Gnome & Rhône. Ce Voisin-là ne produisit que ce monocylindre quatre temps à soupapes latérales ou culbutées. Il reprend les mêmes cotes longue course (71 x 88 mm) que les Blackburne et LMP et équipera dans sa version latérale l’Austral type V de 1928-29, La DFR de 1927-28 (avant que la marque ne soit reprise par Dresch) et la CP Roléo C4SL de 1928 (une marque habituée aux motorisations exotiques puisqu’elle utilisera aussi des Harrissard, des Pauvert, des LMP et des JAP-Staub). Ce rare moteur Voisin à soupapes latérales se distingue par sa « double culasse » où un chapeau en aluminium qui reçoit la bougie est boulonné au-dessus de la classique culasse en fonte. Voisin réalisa aussi une version à soupapes culbutée de son 350 (utilisé par DFR) et projeta également en 1928 un 250 cm3 deux temps dont on doute qu’il n’ait jamais été produit.

Pour plus d’informations, je ne saurais trop vous recommander le remarquable historique sur les Ets de René Albert Voisin publié sur le site des motos Austral.

La seule publicité connue pour les moteurs Voisin, parue dans Moto Revue le 29 septembre 1928
DFR 350 Voisin 1927

Un peu de patience avant de vous lancer dans le grand voyage pour aller visiter le Top Mountain Museum, car il prend ses vacances du 24 avril au 20 mai 2022. Après le dramatique incendie en 2021, le plus haut musée du monde à 2175 m a réouvert en novembre pour la saison de ski, avec un tout nouveau et somptueux local de 4500 m2 où sont exposées 500 motos, de préférence rarissimes, appartenant à 120 marques différentes. Le blog y revient bientôt.

Au Top Mountain Museum, une moto est mise à l'honneur chaque mois et il s'agit en Avril, d'une réalisation française pour le moins originale, La Charron de 1927 (mal datée de 1933) où cadre, fourche avant et accessoires sont entièrement réalisés en bois. Quelle meilleure place pouvait trouver cette Charron que dans un musée, lui aussi entièrement [...]

Ultima 500 : un twin 4 temps horizontal en 1951

Rien d’impossible à Fernand Fargeton, responsable du bureau d’études de la marque lyonnaise Ultima. Puisque son ami et pilote Aimé Despland veut le meilleur side-car du moment, le plus facile est de tout faire soi-même. Ainsi naît cette unique et fantastique Ultima, l’un des premiers twins quatre temps horizontaux de l’histoire et la première 500 de compétition française de l’après-guerre.
Photos & archives François-Marie Dumas/moto-collection.org sauf mention contraire

L’Arsenal

Dans l’immédiat après-guerre, Fernand Fargeton, fils d’un des pionniers d’Ultima, réalise une 350 et une 500 monocylindre à simple ACT puis une quatre-cylindres constituée de quatre monos deux temps accouplés en carré. En 1948, il décide avec le sidecariste lyonnais Aimé Despland, qui finance le projet, de construire de A à Z un attelage de 600 cm3. Eugène Billion, le directeur, n’associe pas officiellement sa marque, en difficultés financières… mais il permet que le travail soit réalisé dans ses ateliers en dehors des heures de travail. Après avoir pensé à accoupler deux monocylindres de Velocette KTT, les deux compères décident finalement de réaliser eux-mêmes le moteur. Ce sera « l’Arsenal », un 600 cm3 bicylindre quatre temps parallèle et horizontal avec une distribution à deux ACT entraînés par deux arbres et couples coniques comme sur les 350/500 NSU de 1938 à 53 à compresseur.

L'Ultima est présentée aux Coupes du Salon le 7 octobre 1951 à Montlhéry. C'est la première nouvelle 500 cm3 de course française de l'après-guerre. Les lunettes noires dissimulent Fernand Fargeton et Aimé Despland est à sa droite. Notez la suspension arrière oscillante dotée d'amortisseurs oléo pneumatiques avec une valve de gonflage. Ils seront abandonnés l'année suivante.
La version 1952 se dote d'un carénage englobant le guidon et perd sa suspension arrirère.

Un des premiers bicylindres quatre temps horizontal

Une mécanique somptueuse, mais, surtout, un concept d’avant-garde qui ne sera un succès commercial qu’un demi-siècle plus tard. Il s’agit en effet d’un des premiers bicylindres quatre-temps horizontaux de l’histoire. Exception faite pour la prestigieuse Hildebrand & Wolfmüller de 1894, quand même bien spéciale avec sa roue arrière qui sert de vilebrequin, cette disposition n’apparaît qu’avec lAJS 500 Porcupine présentée 1947. L’Ultima 500 fait son entrée sur les circuits en 1951, le concept du twin horizontal est repris en 1969 avec la Linto 500 basée sur l’accouplement de deux Aermacchi 250 cm3 culbutées et, tenez-vous bien, il faut attendre l’apparition de la Yamaha 500 T-Max en 2000 pour voir cette disposition de moteur quatre-temps en grande série !

La raison de cette désaffection est simple : sa taille. L’addition d’une boîte de vitesses et de la volumineuse culasse d’un quatre-temps rallonge déraisonnablement l’empattement. Ce problème, résolu sur le T-Max par la compacité d’un moteur moderne et les petites roues d’un scooter, était sans importance pour l’Ultima exclusivement destinée au side-car où l’empattement long est plutôt un avantage et la faible hauteur un impératif.

Les arbres à cames d'admission et d'échappement sont entraînés par des arbres et couples coniques séparés comme sur la NSU 500 de Grand Prix en 1950. C'est beau, mais c'est sans doute la solution la plus onéreuse et celle qui induit les perte de puissance due aux frictions les plus fortes.
Cette 500 NSU bicylindre à compresseur utilisée de 1938 à 53 a certainement inspiré Fernand Fargeton.
L'inconvénient des bicylindres quatre temps horizontaux est leur longueur a fortiori avec, comme ici, une boîte de vitesses séparée.
Aimé Despland, très fier du moteur que lui a concocté Fernand Fargeton qui ne pèse que 55kg (sans sa boîte de vitesses). La moto complète n'avoue d'ailleurs que 165 kg. (archives Jean-Marc Brionnet)

Pas de chance

Pas de chance, le superbe 600 cm3 conçu par Fargeton et Despland est à peine construit qu’une nouvelle réglementation side-car interdit les compresseurs et limite la cylindrée à 500 cm3. C’est donc dans cette cylindrée qu’apparaît l’attelage aux Coupes du Salon à Montlhéry en octobre 1951. Le moteur qui paraît monumental ne pèse pourtant que 55 kg avec ses deux carburateurs et sa magnéto, mais, il est vrai, sans transmission primaire, ni boîte. Ses côtes super carrées de 70 x 64,5 mm lui permettent d’atteindre sa puissance maximale de 48 chevaux au régime, fort élevée pour l’époque, de 8 200 tr/min. Malheureusement, les huiles d’alors sont encore un gros point noir et, en dépit du surdimensionnement de sa pompe à huile que l’on voit sous les deux arbres d’entraînement d’ACT, la belle Ultima abandonne dans sa première course sur ennui de lubrification.

Grâce au moteur horizontal, le cadre est très bas, mais ce double berceau torturé et constitué d’éléments boulonnés démontables ne brille pas par sa rigidité dans sa première version dotée d’une suspension arrière oscillante à deux amortisseurs oléo pneumatiques. Aux grands maux, les grands remèdes : la version 1952, toujours à double berceau démontable, abandonne toute suspension arrière et en profite pour augmenter la contenance du réservoir d’huile.

Il ne suffit pas hélas d’une bonne idée, les moyens manquent pour faire évoluer « l’Arsenal » et les grandes marques reviennent en force avant qu’elle n’ait eu le temps de s’affirmer. Elle sera cédée au coureur régional Roger Besse et abandonnera bientôt les circuits.

Pas de suspension arrière sur la moto ni sur la roue du side-car Impérial.
Fargeton s'est sans aucun doute inspiré de l'Italie où le carénage avant prolongeant le réservoir et englobant le guidon était alors très à la mode.
Ce joli petit tambour du double frein simple came devait quand même être un peu léger !
Aimé Despland et un mécano présentent le moteur en 1951.(archives Jean-Marc Brionnet)

Fiche technique

Bicylindre 4 temps horizontal – 496 cm3 (70 x 64,5 mm) – 2 ACT entraînés par arbres et couples coniques – 48 ch/ 8 200 tr/min – Graissage à carter sec – Boîte de vitesses séparée à 4 rapports – Transmissions primaire et secondaire par chaînes – Cadre double berceau tubulaire démontable – Suspensions oléopneumatiques : avant télescopique, arrière oscillante à 2 amortisseurs en 1951, cadre rigide en 1952 – Double frein simple came à l’avant – Poids : 165 kg – Moteur seul  avec ses carburateurs et sa magnéto: 55 kg –  Vitesse avec side 150 km/h.

Le sidecariste Aimé Despland eut une assez brillante carrière. On le voit ici au guidon d'une Jonghi 350 TJ4 attelée d'un side-car Impérial avec laquelle il vient de finir second en catégorie side 350 derrière la Sunbeam de Robert Kiéné au Bol d'Or 1936. Comme d'usage c'est Eugêne Mauve qui pose entre Despland et son "singe" Lhéritier.(archives Jean-Marc Brionnet)
Rien d’impossible à Fernand Fargeton, responsable du bureau d’études de la marque lyonnaise Ultima. Puisque son ami et pilote Aimé Despland veut le meilleur side-car du moment, le plus facile est de tout faire soi-même. Ainsi naît cette unique et fantastique Ultima, l’un des premiers twins quatre temps horizontaux de l’histoire et la première 500 [...]

AMC : Les aventures des moteurs clermontois

De livre en livre, l’histoire de la moto française, trop longtemps peu documentée, va finir par avoir un catalogue presque complet. Une nouvelle étape vient d’être franchie, et de belle manière, avec « Les aventures de moteurs Clermontois », un bel ouvrage qui vous livre en détails et en images toute l’histoire des moteurs AMC qui furent les principales motorisations en quatre temps des motos françaises des années 50, si prisées aujourd’hui en collection.

AGF, Alcyon, Automoto, DS Malterre, Favor, Follis, Guiller, Liberia, Monet Goyon, New Map, Scootavia, Syphax… 46 marques en France et 8 en Italie, Espagne et Grande-Bretagne ont été motorisées par les Ateliers de Mécanique du Centre créés à Clermont-Ferrand par les frères Henri et Louis Chartoire suivi par son fils Gilbert. Un tel succès méritait bien d’être conté.

Les aventures des moteurs clermontois par Jean Malleret et Serge Basset

Livre relié cousu à couverture rigide, 150 pages, 235 illustrations en noir et blanc et en couleurs, format carré 24,5 x 24,5 cm – 39 € ttc –  Editions Val d’Allier – ISBN978-2-36348-018-7

A commander en librairie, chez l’éditeur, 33 rue du docteur Dumas à Thiers 63300 (06 69 95 72 74 -04 73 94 79 31) ou chez l’un des auteurs : jean.malleret@laposte.net

Le sommaire d'un livre est sans aucun doute le point le plus important et celui-ci ne mérite que des éloges. C'est clair, logiquement ordonné et avec un agréable équilibre entre les photos, les historiques et les descriptions techniques des moteurs et de leurs évolutions
L'histoire est aussi détaillée en texte qu'en photos et on y découvre quelques moutons à 5 pattes bien intéressants.
Une partie technique précise sans être trop envahissante qui mérite de devenir la bible de tous les collectionneurs de motos équipées de ces moteurs clermontois. Des tableaux récapitulatifs dans les dernières pages résument toutes les caractéristiques et réglages des différents moteurs AMC.
Les AMC en course sont largement traitées et illustrées (avec d'ailleurs nombre de photos issues de mes archives) et une annexe à la fin du livre donne un palmarès complet des résultats.

Un mot sur les auteurs tout aussi clermontois que les motos dont ils nous parlent

Jean Malleret, professeur d’histoire-géographie en retraite, déjà connu des collectionneurs pour son petit livre sur les motos Favor et Serge Basset, chef de projet dans l’industrie, se rencontrent à la fin des années 70. Ils font connaissance lors d’une manifestation de motos anciennes ; le premier roule alors en 125 Gima, le second vient de récupérer un moteur 250 AMC. L’un comme l’autre veut en savoir plus sur l’histoire de ces mécaniques.

De recherches en trouvailles, de brocantes en bourses d’échanges, ils accumulent une abondante documentation et rencontrent nombre des acteurs de cette aventure. C’est ainsi qu’au début des années 80, Serge Basset fit connaissance d’Henri Chartoire à l’occasion d’une émission de télévision où son 250 AMC sert de décor. Après plusieurs articles pour la revue associative «  Le Motocyclettiste  » et une longue période de maturation, nos compères se lancent enfin dans la rédaction de cet ouvrage.

De livre en livre, l'histoire de la moto française, trop longtemps peu documentée, va finir par avoir un catalogue presque complet. Une nouvelle étape vient d'être franchie, et de belle manière, avec "Les aventures de moteurs Clermontois", un bel ouvrage qui vous livre en détails et en images toute l'histoire des moteurs AMC qui furent les principales [...]

Nouvelles Nougier et Alcyon à Issoire

Les journées de roulage les 19 et 20 mars derniers sur le circuit d’Issoire (qui gagne vraiment à être connu) étaient spécialement consacrées à un hommage à Alain Chevallier et réunissaient la quasi-totalité des motos de course et prototypes qu’il a réalisés. Plus, bien évidemment, les Voxan, dont le remarquable petit musée dans l’enceinte du circuit vaut à lui seul le déplacement. Je ne saurais trop vous conseiller de visiter Pit-Lane.biz rubrique « Sorties » pour détailler toutes les motos de course présentes, mais il y avait aussi des ancêtres peu ou jamais vus dont voici quelques photos en attendant d’y revenir en détail.

La quasi totalité des motos construites par Alain Chevallier étaient la et souvent avec leurs pilotes.

Première absolue, La Nougier 350 quatre cylindres. Essentiellement développée dans sa version 500 cm3, car c’est ce qui voulait son mécène Pierre Collignon, la quatre cylindres Nougier était aussi prévue au départ en 350 cm3. Ce projet était resté en suspens jusqu’à ce que, dans les années 80, Jean Nougier décide de reprendre sa copie du début des années 50 en l’améliorant, en particulier avec un vilebrequin monobloc et non plus assemblé. Il retravailla le moteur assisté par Claude Caucal, jusqu’à ce que son état physique le contraigne à abandonner avant que la mécanique soit prête. C’est fait aujourd’hui. Claude Caucal a terminé les pièces non finies, entre autres le vilebrequin, et la 350 quatre cylindres a fait sa première apparition publique à Issoire. Dommage il manquait encore quelques ultimes modifications du système de graissage avant que le quatre cylindres ne puisse être mis en route pour la première fois, ce qui ne saurait tarder.

Alcyon 175 double ACT de 1953 : une renaissance. Vous la connaissez cette Alcyon ! Elle figure depuis bien longtemps dans les fiches sur ce site, mais elle était alors équipée d’un moteur AMC certes très préparé pour la course, mais toujours avec sa distribution d’origine par tiges et culbuteurs. Jean-Marc Brionnet, qui a récemment racheté cette superbe petite moto s’est bien évidemment empressé d’y monter l’AMC double ACT d’usine avec lequel on la vit à l’époque.

En 1953, avec le double ACT qu'elle a enfin retrouvé.(archives Jean-Marc Brionnet)
Une carburation un gros poil trop riche empêcha l'Alcyon de démontrer son potentiel, et son mécanicien et pilote René Bayssat l'a vite délaissé pour tourner sur la Paton ex Appietto… On ne lui en voudra pas !
L'Alcyon 175 avec son moteur AMC culbuté
et celle maintenant avec le moteur AMC double ACT.

L’autre vedette parmi les anciennes rares était l’unique Ultima 500 développée en 1951 par Fernand Fargeton. Je vous en reparle en détail très très bientôt.

Les journées de roulage les 19 et 20 mars derniers sur le circuit d'Issoire (qui gagne vraiment à être connu) étaient spécialement consacrées à un hommage à Alain Chevallier et réunissaient la quasi-totalité des motos de course et prototypes qu'il a réalisés. Plus, bien évidemment, les Voxan, dont le remarquable petit musée dans l'enceinte du [...]

Salon de Lyon 2022 : l’expo Lino Tonti

J’enrage ! le compte rendu à la taille de l’évènement que je me promettais de faire pour cet extraordinaire Salon du 2 Roues à Lyon s’est vu drastiquement réduit par une stupide perte de mémoire informatique de mes documents. Les deux plus grands perdants de cet accident ont été l’exposition Guzzi qui méritait pourtant beaucoup de photos. Pour se rattraper on peut revenir sur l’article publié ici sur les cent ans de la marque  de Mandello del Lario il y a quelques semaines.En revanche l‘expo en hommage à Lino Tonti qu’Alain Nibart et moi avions concoctée est totalement passée à l’as ; j’y reviens donc aujourd’hui avec quelques vues prises avec l’iPhone d’Alain et d’autres photos obligeamment prêtées par le photographe officiel du salon, David Marnier, que je remercie vivement.

Pour d’autres photos de ce salon grandiose, je ne saurais trop vous conseiller de visiter le site Flickr de mon ami Mike Ricketts qui vient de publier deux premières série sur les marques de A à L, les marques de M à Z,  les Yamaha TZ et sur les side-cars .

Lino Tonti : L’ingénieur de tous les défis

On connaît beaucoup d’ingénieurs spécialisés dans la course, ou les scooters ou les utilitaires, et généralement liés à une marque, parfois deux. Lino Tonti est leur contraire, de 1939 aux années 80, cet ingénieur aussi discret que brillant, a marqué toute l’industrie italienne de la moto, travaillé pour toutes les grandes marques et créé leurs plus grands succès en motos utilitaires, comme en machines de Grand Prix, de course ou de record. Il représente à lui seul un demi-siècle d’histoire de la moto italienne.

La Linto 500 créée en 1957
Lino Tonti a conçu en 1961 les 350/500 bicylindres Bianchi, un concept qu'il continue de faire évoluer en 1966 sous le label Paton (PATtoni - TONti)
La moto-scooter Dama, dont je vous ai déjà longuement parlé, faisait à Lyon l'une de ses premières apparitions publiques et son curieux moteur intrigua fort les visiteurs.
Lino Tonti a construit cet exemplaire unique de l'exubérante Marilina, pour son voyage de noces ! Retrouvée en pièces et à l'état d'épave, elle a été reconstruite par Alain Nibart assisté de Dominique Secco.
Les trois Aermacchi de Tonti, au fond, le Monsone qui s'illustra aussi aux ISDT, au milieu le 125 Cigno sorti en 1951 et en avant, la 250 Bicilindrica, où deux moteurs de 125 sont accouplés.
Aussi à l'aise dans l'élaboration de petits utilitaires que dans celle des motos de course, Lino Tonti a réalisé les premières motos Aermacchi, Cigno, puis Monsone en 125 cm3 deux temps.
Chez Moto Guzzi à la fin de sa carrière, Lino Tonti crée successivement la V7 Sport, la V 1000 Convert et la V50.

Après des études d’ingénierie aéronautique, il débute chez Benelli en collaborant avec Giuseppe Benelli en personne pour la réalisation de la formidable 250 quatre cylindres à compresseur et de la 500 quatre cylindres de 1939.

Dans l’immédiat après-guerre, il crée son propre bureau d’études et sa propre marque Linto (pour LINo TOnti) et s’illustre dès 1949 avec un monocylindre quatre temps de 75 et 100 cm3 à double ACT entraîné par cascade de pignons. En 1956, ces deux versions du moteur seront utilisées par Aermacchi sur un cigare de records, le Siluro. Qui atteindra 167 km/h en 75 cm3 piloté par Massimo Pasolini, le papa de Renzo, l’un des pilotes star des Grands Prix.

Lino Tonti a entre-temps quitté les doubles ACT de records pour créer un sympathique scooter à grandes roues à moteur deux-temps, le Linto 125 Cigno qui peut se transformer en sportive grâce à un réservoir « repliable » sur l’avant du cadre. Acheté par Aermacchi le projet est commercialisé en 1951 sous le nom de 125 N Cigno et se double l’année suivante d’une version M Monsone doté d’un gros réservoir type moto. Il équipera l’équipe Aermacchi aux ISDT. Toujours chez Aermacchi, Lino Tonti conçoit en 1952, la 250 Bicilindrica deux temps qui sera la première vraie moto routière de la marque.

En 1954, Lino Tonti s’en servira comme base pour réaliser pour son usage personnel, la Linto 250 Marilina, une moto totalement fantasmagorique à l’esthétique inspirée par les automobiles américaines de l’époque. Un rêve, mais pas seulement puisque l’ingénieur utilisera cette moto pour partir en voyage de noces !

Revenu à son propre bureau d’études Tonti étudie un scooter à grandes roues d’une incroyable modernité, la Linto Dama qui se distingue par un bloc moteur boîte ultra compact avec un moteur central 4 temps culbuté à cylindre horizontal et transversal et une transmission par arbre et cardans. Il en sera construit trois prototypes différents, dont un en version moto, mais ni Aermacchi, ni les autres industriels contactés ne donneront finalement suite. L’exemplaire exposé ici est le seul survivant.

Nouvelle collaboration et retour à la compétition en 1956 avec la FB Mondial 250 bicylindre. Mondial arrête la compétition en 1957, mais, obstiné, Lino Tonti crée avec Giuseppe Pattoni, la marque Paton (PATonni- TONti) avec une 175 double ACT sur base Mondial en 1958 puis une 250 bicylindre.

La même année Lino Tonti est engagé par Bianchi chez qui il réalise en 1958 la 400 Raspaterramonocylindre double ACT, l’une des plus fameuses machines du motocross. Passant du coq-à-l’âne, Tonti est ensuite l’auteur en 1960 des scooters Bianchi Bibi et Orsetto, puis d’une très réputée moto militaire, la 350 MT 61 en 1961 qui servira de base pour réaliser la 400 Raspaterra de motocross à double ACT. Tonti crée la même année les 350/500 Bianchi bicylindres de Grand Prix qui évolueront en 1966 sous label Paton.  Brièvement passé chez Gilera, Tonti y conçoit une 125/150 cm3 qui sera l’un des plus grands succès commerciaux de la marque la Gilera 125 5V. Il collabore également avec Giuseppe Salmaggi pour la réalisation de la 500 bicylindre quatre temps B50 qui est présentée au salon de Milan en 1967, mais ne sera jamais commercialisée.

Cette même année 1967, c’est sous sa propre marque que Tonti crée la Linto 500, basée sur l’accouplement de deux moteurs de 250 Aermacchi qui se distinguera maintes fois en particulier aux mains de Gyula Marsovski (la machine exposée à Lyon) 2e au championnat du monde 500 derrière Agostini en 1969.

Lino Tonti termine ensuite son tour des grands constructeurs italiens chez Moto Guzzi qu’il rejoint en 1973 et chez qui il va concevoir ce qui est sans doute sa plus fameuse réalisation le 750 V7 Sport en 1971 première machine de grande série contrôlée à plus de 200 km/h. Il est ensuite l’auteur de la V1000 Convert à convertisseur hydraulique et boîte deux rapports puis, sous l’ère De Tomaso, de la Guzzi/Benelli 250 quatre cylindres, qui est bien la seule des quatre cylindres de cette période à n’être pas qu’une simple copie des Honda mais une réelle réalisation maison qui, outre son moteur, se distingue par une carrosserie entièrement en plastique injecté. Enfin, l’ultime création de Lino Tonti et, non des moindres est la 500 V50 sortie en 1979 qui une fois encore cumule les nouveautés techniques.

Né en 1920, Lino Tonti s’est éteint en 2002 après avoir travaillé jusqu’à l’aube des années 90.

J'enrage ! le compte rendu à la taille de l'évènement que je me promettais de faire pour cet extraordinaire Salon du 2 Roues à Lyon s'est vu drastiquement réduit par une stupide perte de mémoire informatique de mes documents. Les deux plus grands perdants de cet accident ont été l'exposition Guzzi qui méritait pourtant beaucoup [...]