Avenue de la Grande Armée : un siècle de motos

L'avenue de la Grande Armée au tout début du siècle dernier (mais ne dites surtout pas à Hidalgo qu'il y avait des arbres et pas de voitures avant !)

L’avenue parisienne de la Grande Armée, où sont réunies les vitrines de la quasi-totalité des marques de motos, rebute généralement les collectionneurs, guère attirés par ces engins trop modernes, mais que diriez-vous d’une visite virtuelle de son histoire ? Premier chapitre le N° 26 de 1910 à nos jours.

Le n° 26

Ce n’est pas d’hier que toutes les marques de moto ou presque s’exposent à Paris avenue de la Grande Armée, et le hasard d’une découverte d’un ami me permet aujourd’hui de vous faire suivre l’évolution d’un de ces magasins au fil du temps, celui de Alfred Prevost distributeur multimarque chez qui on vit successivement les Excelsior britanniques, Clément Gladiator, les cyclecars Morgan, Moto Guzzi, FN, Monet Goyon, Gima, Gillet d’Herstal, Sunbeam. C’est ensuite son fils, Jacques Prévost qui reprend l’affaire et le magasin devient concessionnaire exclusif Motobécane. Dans les années 60, le 26 avenue de la Grande Armée sera revendu à Peugeot Cycles qui tient toujours boutique au même endroit à côté de Kymco et Easy Monneret et juste un peu après Indian au numéro 22.

Le magasin d'Alfred Prévost dans les années 10 débute avec les cycles Clément et les automobiles Bayard.
Au début des années 20
Vers 1925 : Alfred Prevost consacre presque toute sa vitrine à Clément Gladiator, dont la maison mère n'est pas loin, rue des Acacias.
Dans les années 30, le magasin s'appelle désormais "Grande Armée Motos" et représente entre autres, Dollar, FN, Gillet Herstal, Motobécane et Monet Goyon. On distingue en remontant une vitrine "Pièces Peugeot", un magasin Terrot au n°30 et Alcyon à la porte suivante..
1950 : Moto Guzzi fait son apparition en vitrine avec son scooter à grandes roues Galletto., tandis que, de l'autre côté, est exposée une Motobécane 350 Superculasse. en toute fin de carrière.
Refonte totale en 1953 ou le n°26 devient exclusif Motobécane avec cette année là la présentation du premier scooter de la marque.
Toute la gamme Motobécane 1953 s'expose dans des locaux au top du modernisme de l'époque.
Et, comme aujourd'hui, de la customisation, ici une selle biplace genre Denfeld qui donne un coup de jeune à la 175 Z2C Mobysuper de 1954.
Le n° 26 réunit aujourd'hui Peugeot, aux côtés de Kymco et Easy Monneret.(Google map)
Inauguration du magasin Peugeot Motocycles revisité en 2021 (D.R.)

Voilà pour l’histoire de Prévost père et fils, mais ne quittons pas l’avenue de la Grande Armée et le prochain article traitera de l’arbre généalogique motocycliste de tous les magasins de la célèbre artère.

L'avenue de la Grande Armée au tout début du siècle dernier (mais ne dites surtout pas à Hidalgo qu'il y avait des arbres et pas de voitures avant !) L’avenue parisienne de la Grande Armée, où sont réunies les vitrines de la quasi-totalité des marques de motos, rebute généralement les collectionneurs, guère attirés par ces [...]

Bridier-Charron : le faiseur d’arbre

Si t’as pas une transmission par arbre, t’es rien !  Tel est le dicktat imposé par la mode aux constructeurs de motos françaises dès 1929. Motobécane, Dollar, Train, PP Roussey même (bien que sa quatre pattes annoncée à moteur Chaise n’ait jamais été vue) présentent leurs quatre cylindres acatène en 1929 et 30 et nombre de monos et bicylindres haut de gamme suivent le même chemin tandis que, pour les usines qui n’ont pas les moyens techniques de développer leur propre transmission, il existe une solution miracle : Bridier-Charron.

La Favor 350 K à moteur JAP à soupapes latérales et boîte-transmission Bridier Charron au salon de Paris 1929 (archives Jean Malleret)

Quelle idée de génie que cette transmission Bridier-Charron présentée au salon de Paris en 1928 qui propose de transformer n’importe quel moteur existant en bloc moteur-boîte à transmission acatène. Il suffit de monter le moteur en travers, et de connecter sur l’axe du vilebrequin, dès lors dans l’axe de la moto, un ensemble composé de cinq éléments boulonnés entre eux. Un premier carter d’accouplement spécifique à chaque modèle, qui intègre l’embrayage monodisque à sec, la boîte de vitesses, un petit carter pour le système de kick, l’arbre de transmission puis son couple conique associé à un moyeu Lardy (Ydral) également fabriqué à Suresnes à 800 mètres des usines Bridier & Charron.

 

Publicité dans Moto Revue en 1931
La moto de test de Bridier Charron en octobre 1928

Albert Bridier et F. Charron (dont on entendra guère plus parler) créent en 1924 à Suresnes leur société qui se spécialise bien vite dans la fabrication de boîtes de vitesse qui vont équiper de nombreuses marques en particulier celles du groupe Gentil, Alcyon en tête. (Étude complète dans la revue du Motocyclettiste n°107 et 108).

Le bloc boîte-transmission acatène Bridier-Charron présenté en octobre 1928 et essayé dans sa version prototype par Max End dans Moto Revue, fait sa rentrée officielle au salon de Paris d’octobre 1929 avec la Majestic 750 V twin JAP culbuté et la Favor 350 K à moteur JAP. Faux départs, car la Majestic ainsi motorisée n’est jamais commercialisée tandis que la marque stéfanoise Favor, présente, l’année suivante une 350 G beaucoup moins chère à bloc moteur Staub associé à une transmission acatène due aux établissements Lardy (Ydral). Réservé par nature aux grosses cylindrées, le kit boîte-transmission par arbre apparaît aussi accouplé à des moteurs JAP sur les Helyett 750 V twin et 500 mono de 1930 mais est loin d’avoir autant de succès que les boîtes de vitesses classiques proposés par la marque Le concept de kit boîte-transmission adaptable sur quasi toute moto était sans probablement une fausse bonne idée bien difficile à réaliser. Il apparaît en tout cas que sur les rares exemples connus qu’il n’y a pas deux ensembles identiques.

Un ensemble prévu pour s'adapter sur la plupart des moteurs à partir de 350 cm3.
Moyeu Ydral et couple conique a taille gleason en spirale.(dessins de Moto Revue et "Le monde motocycliste"
Un très beau dessin de Moto Revue illustrant la Majestic dans sa première version sur châssis avec le 750 JAP V twin culbuté et la transmission Bridier Charron au salon de Paris 1929.
La Majestic à cadre coque, moteur Chaise 350 cm3 et transmission Bridier Charron au salon de Paris 1930. (archives Thibault Jodocius)

Helyett 750 V twin MH 136 : la contre-offensive

Bien joué, la petite marque de Sully-sur-Loire qui ne s’en laisse pas conter par les quatre cylindres vedettes du salon de Paris 1930 et présente en grande pompe la même année une 750 cm3 animée par le très réputé moteur JAP à soupapes latérales qu’elle dispose face à la route en l’accouplant à une boîte française Bridier-Charron associée à une transmission par arbre. Bon, d’accord, cette belle Helyett twin ne sera guère plus vendue que les quatre pattes sus-citées, mais elle reste au catalogue et aux salons jusqu’en 1933. Toute petite marque qu’elle soit Helyett présentait d’aillieurs 25 références à ce catalogue 1933, mais ne vous laissez pas abuser par les nuances. Il y a en fait, en deux temps à moteur maison, une BMA 100 cm3, une 175 et une 250 puis en quatre temps, une 250 latérale et une 350 culbutée à moteurs JAP, une 350 à moteur Chaise à chaîne ou à arbre, une 500 culbutée à moteur JAP et arbre et notre belle 750.

La Helyett 750 JAP-Bridier Charron ici au salon de Paris 1933 (archives Pierre Bruneteau président du club René Gillet)

Fiche technique Helyett 750 MH136 – 1930-1933

Moteur JAP bicylindre en V face à la route, refroidi par air – 750 cm3 (70 x 97 mm) – Un carburateur Amac 5/001 – Magnéto (1930) puis Magdyno (1933 – Graissage par pompe mécanique – Embrayage monodisque à sec – Boîte Bridier-Charron à 3 rapports par levier au réservoir – Transmission par arbre et couple conique – Cadre double berceau – Suspension avant à parallélogramme type Druid – Pneus 3,50 x 19’ – Freins à tambour ø 200 mm – Roues à démontage rapide- 135 kg -Prix 8800 F avec éclairage (La Helyett 500 JAP- Bridier Charron est à 7500 F et pour comparaison une Gnome & Rhône 500 V2 vaut 7850 F)

 

La Helyett 500 MH130 JAP Bridier Charon au salon de Paris 1930 (archives Pierre Bruneteau)
L’idée de base de Bridier Charron était de réaliser un kit boite-transmission standard pouvant équiper pratiquement toutes moto, on trouve pourtant déjà des différences en comparant deux photos du même modèle, la Helyett 350 K au salon 1929 et celle de 1930 que vous pourrez bientôt admirer au nouveau musée de Lunéville. Kick tranversal pour l’une, latéral à droite pour l’autre, par exemple.

Nouveau, le V Twin transversal et acatène ?

L’architecture n’est pas courante bien qu’elle fut apparue dans les premiers âges de la moto avec la Moto-Cardan de 1900 et l’Ader 478 cm3 de 1901, on pourrait même compter l’Archdéadon  à moteur Buchet de 1903, à ceci près qu’il entraînait ici une hélice et non la roue arrière. On verra aussi, la Spring 750 en 1920 en Belgique et l’AJS 500 S3 de la même année en Grande-Bretagne, les Majestic 750 JAP culbutées du salon 1929, l’Indian 750 modèle 841 de 1941, sur les Lilac au Japon dans les années 60, les Victoria V35 des années 50, et bien sur la Moto Guzzi 700 V7, première d’une longue lignée en 1968, les CX 500 et 650 Honda à partir de 1977 ! J’en ai peut-être oublié, mais ce n’est pas sur et vous admettrez que cette configuration est largement minoritaire avec une dizaine de marques concernées.

Moto Cardan de 1904 (archives BNF Gallica)
Si t’as pas une transmission par arbre, t’es rien !  Tel est le dicktat imposé par la mode aux constructeurs de motos françaises dès 1929. Motobécane, Dollar, Train, PP Roussey même (bien que sa quatre pattes annoncée à moteur Chaise n’ait jamais été vue) présentent leurs quatre cylindres acatène en 1929 et 30 et nombre de [...]

Gillet fête ses 101 ans

Covid oblige, l’exposition consacrée aux 100 ans de Gillet d’Herstal n’a pas eu lieu comme prévu en 2020, mais il n’est pas trop tard; l’évènement se déroulera dans le hall prestigieux d’Autoworld à Bruxelles du 30 octobre au 7 novembre prochain. Yves Campion, Vincent Derdeyn, Michel Degueldre et  Jean Leux y présenteront près de 80 motos Gillet, soit la quasi totalité des différents modèles produits, avec, en vedette, la 350 du Tour du Monde de  1926 par Robert Sexé, prêtée par le Grand atelier, musée  d’art et d’industrie de Chatellerault et la Gillet de l’expédition vers Léopoldville confiée par le musée de la vie wallonne à Liège. Toutes les machines seront accompagnées de photos et documentations d’époque et en attendant votre visite à Autoworld vous pouvez vous remémorer l’historique de la marque avec les 14 fiches qui lui sont consacrées et qui ont été rédigées pour la plupart par Yves Campion, initiateur de l’exposition et auteur du livre « Les motos Gillet Herstal » qu’on peut lui commander en direct.

ATTENTION Bruxelles a rétabli l’Octroi. Pour se rendre dans Bruxelles-centre, zone à faible émission, il faut impérativement inscrire votre véhicule sur lez.brussels (https://lez.brussels/mytax/fr/registration/start) sous peine d’une amende de 350 €. Toutes infos sur https://lez.brussels/mytax/fr/registration.Toutes les plaques des voitures entrant dans le centre sont scannées et celles non déclarées recevant l’amende et pour simplifier la vie à ces braves gens, on vous demande copie de votre carte grise. Bonjour le respect de la vie privée. N’aurait-il pas été plus simple pour le gouvernement belge d’accepter le passage de 0,x % de véhicules étrangers hors normes plutôt que de répertorier les données de TOUS les visiteurs en extorquant 350 € aux pauvres péquins qui n’ont pas été avertis. Comme si cela ne suffisait pas, Bruxelles s’est doté d’une palanquée de radars pour contrôler les 30 km/h règlementaires… Bravo, on pensait que pire qu’Hidalgo n’était pas possible, les Belges prouvent le contraire ! 

Covid oblige, l'exposition consacrée aux 100 ans de Gillet d'Herstal n'a pas eu lieu comme prévu en 2020, mais il n'est pas trop tard; l'évènement se déroulera dans le hall prestigieux d'Autoworld à Bruxelles du 30 octobre au 7 novembre prochain. Yves Campion, Vincent Derdeyn, Michel Degueldre et  Jean Leux y présenteront près de 80 [...]

Majestic & Dollar 500/750 V4 à moteur Chaise

Quelle révolution à ce salon de Paris 1930 au Grand Palais où les vedettes sont quatre motos à quatre cylindres à 100 % Françaises. Impensable et inattendu, la France si longtemps absente au niveau international s’apprête-t-elle à repartir à l’attaque d’une place depuis longtemps perdue ?  

Photos et archives François-Marie Dumas sauf mention contraire – Ciquez sur les liens pour accéder aux fiches techniques

 

Salon de Paris 1930 : La Majestic à moteur Chaise 4 cylindres (rond jaune) et la Dollar (rond rouge) entourée de visiteurs au centre du stand de la marque.

Chez Motobécane, qui a déjà présenté sa 500 B7 quatre cylindres à soupapes latérales au salon 1929, trône cette fois une formidable 750 à arbre à cames en tête ; chez Train c’est une 500 culbutée très compacte assortie d’une promesse de livraison de son moteur à toute marque désireuse de l’acheter. Majestic annonce d’ailleurs qu’il pourrait être disponible dans sa gamme, ce qui semble bien improbable. Sur des deux stands des marques de l’Omnium Métallurgique et Industriel, Dollar et Majestic qui vient d’être racheté par l’OMI cette même année 1930, apparaît le quatre cylindres Chaise, une mécanique elle aussi étonnamment compacte.

Moteur 500 Chaise quatre cylindres en V de 1930

Trois dessins de 500 Chaise de 1930, celui de gauche montre la version carénée pour voiturette, cyclecars ou usage statique et les deux à droite, pour la moto montrent bien l’extrême compacité de ce moteur qui, du coup, n’impressionne guère. Le tir sera corrigé en 1932. A noter le kick qui s’actionne latéralement et le levier direct du changement de vitesse. (dessins Moto Revue et Le monde motocycliste)

Au contraire des moteurs Motobécane, les quatre cylindres Train et Chaise n’ont pas été étudiés uniquement pour la moto, mais aussi pour des utilisations en statique ou sur d’autres types de véhicules, voitures légères, trois roues commerciaux ou cyclecars, voire même des avionnettes alors très en vogue. Ce moteur est d’ailleurs une réduction à l’échelle 4/10 du quatre cylindres inversés du Chaise AV2 de 100 chevaux destiné à l’aviation.

Étudiées par l’ingénieur Berthé, comme le 750 qui va suivre, le 500 cm3 Chaise présenté au salon 1930 est affublé d’une turbine de refroidissement par air forcé devant la mécanique. Sur la Majestic où ce refroidissement forcé est obligatoire, car le moteur caché dans son cadre coque en tôle ne reçoit que bien peu d’air extérieur, le carénage du ventilateur se prolonge d’une écope devant les cylindres qui restent bien visibles, tandis que sur la version statique un capotage complet recouvre ce moteur.

Belle astuce mécanique, pour rendre le moteur le plus compact possible. Les cylindres fonte, coulés d’un bloc avec le carter moteur supérieur, sont en V très fermé de 14° et disposés en quinconce ce qui a permis de raccourcir au maximum le vilebrequin. Toute la culbuterie reste à l’air libre, dommage, car, même en 1930 cet exhibitionnisme mécanique est un peu dépassé. Ce Chaise à quatre pattes est légèrement longue course avec des côtes de 50 x 63 mm. La pipe d’admission et l’unique carburateur sont centrés à l’arrière du bloc-cylindres et cette pipe d’admission est entourée par le prolongement ailetté de l’unique sortie d’échappement qui vient de droite et repart ici vers la gauche avec un seul petit silencieux en tôle et à queue de carpe. La boîte de vitesses comporte trois rapports commandés par un court levier direct sur la boîte et il est, nous dit-on, prévu une marche arrière pour l’usage en cyclecar. Le kick à droite s’actionne de haut en bas.

Dollar 500 Chaise V4 type Z – 1930

Le 500 sur le stand Dollar au salon 1930 est simplement suspendu à l’habituel « L » en acier matricé cher à Dollar avec un triangle arrière en tubes ronds. (archives Thibault Jodocius)
La vue de l’arrière le curieux chemin de la pipe d’échappement dont la sortie ailettée entoure la pipe d’admission. (archives Thibault Jodocius)

Beaucoup plus exhibitionniste que la Majestic, la Dollar dévoile ses dessous sans complexe avec, comme sur les monocylindres de la marque, un cadre simple berceau interrompu constitué d’une poutre en L en acier matricé. Une technique chère à Dollar. Cette poutre intègre la colonne de direction, le tirant avant rejoint le moteur et la partie supérieure est reliée sous la selle à une triangulation en tubes supportant la roue. (Bizarrement il apparaît au même salon un monocylindre où ce triangle arrière est en acier matricé !)

Majestic 500 Chaise V4 – 1930

Un peu de généalogie pour mieux comprendre. En 1930 Georges Roy, créateur des motos Majestic en a confié la fabrication à l’Omnium Métallurgique et Industriel que vient de créer Claude Bajard. Dollar rachète Majestic en 1930. Deux ans plus tard, l’Omnium, qui a repris l’usine de Maurice Chaise, rachète la marque Dollar qui n’arrive plus à payer ces moteurs. La production des Majestic s’arrêtera en 1933 après une centaine de motos commercialisées.

Majestic annonce son modèle motorisé par le 500 Chaise quatre cylindres dans le numéro présalon de Moto Revue, mais on ne verra malheureusement pas de photo vraiment descriptive.
Il m’a fallu une loupe pour distinguer sur cette rare photo, la lignée des culbuteurs du moteur Chaise derrière cette belle vue de la suspension au salon 1930. (archives Thibault Jodocius)

La Majestic équipée du 500 Chaise quatre cylindres inaugure le nouveau cadre coque sans châssis et il faut soulever son capot pour voir la différence avec les versions mues par un monocylindre. Nul n’a revu cette fabuleuse Majestic à moteur Chaise quatre cylindres présentée au salon 1930, elle exista pourtant et fut même présentée au service des Mines et homologuée le 14 mars 1931.

Dollar type T à moteur Chaise 4 cylindres en V – 1932-1934

Des origines aéronautiques

Le modèle : le 6000 cm3 type 4B de 1932 destiné à l’aviation qui, comme les quelques autres Chaise aéronautiques ne connut qu’un succès fort limité. (archives Alain Reboul) Ci-contre : Le prospectus publicitaire des moteurs aéronautiques Chaise en 1932
Sublime ! Que dire de plus… L’axe du kick est derrière la boîte de vitesses ce qui a conduit à une forme très torturée de la pédale pour contourner l’échappement.

Il n’y a pas de salon de la moto en 1931, mais, surprise, la Dollar V4 revient au Grand Palais totalement revue le 6 octobre 1932.

Il s’agit cette fois d’un V4 de 750 cm3 inspirée non pas du moteur d’avion AV2 comme le 500, mais de son successeur le 4B ; les côtes sont légèrement super carrées avec un alésage de 62,5 mm et une course de 60,8 mm. Le vilebrequin est démontable et les têtes de bielles tournent sur galets. La turbine de refroidissement a disparu et il n’y a toujours qu’un seul carburateur sur la face arrière du bloc-cylindres, mais décalé vers la droite. Totalement différent du 500 le moteur conserve une fonderie d’un bloc du carter supérieur et des cylindres, mais cette pièce remarquable est cette fois en alliage léger avec un chemisage fonte. Il y a deux culasses également en alliage léger, mais queues de soupapes, culbuteurs (montés sur aiguilles) et ressorts sont désormais enfermés. Seules les tiges de culbuteurs restent à l’air libre. Fini aussi, le simple échappement trop discret. Ici les tubes jaillissent des deux cylindres avant et s’allongent vers leurs silencieux sous l’axe de roue arrière, tandis que, de l’arrière sortent deux tubes qui passent dans le triangle tubulaire sous la selle ressortent le long de la roue. Les trois vitesses sont commandées à gauche sur la boîte et actionnée, au prix de compliqués renvois, par un levier à droite du réservoir.

La Dollar de Gérard Gruschwitz est bien la machine exposée au salon de 1932 avec le numéro de série 2001. Le moteur ne conserve du 500 que l’architecture générale, mais le bloc cylindres-carter moteur supérieur est en alliage léger et la culbuterie est enfermée avec une culasse en deux parties.
La 750 T de 1932 magnifiquement restaurée par Gérard Gruschwitz est la seule qui s’expose de temps en temps et encore, pas souvent. Elle fut quand même l’une des vedettes de l’exposition organisée par les musées Guggenheim, il y a quelques années.

La grande nouveauté du moteur a fait souvent oublier de parler de la partie cycle qui est pourtant tout aussi novatrice. Le L supérieur en acier matricé cher à Dollar et déjà vu sur la 500 en 1930, est conservé et il s’y ajoute deux doubles berceaux interrompus en tubes qui soutiennent le moteur sur l’avant et l’arrière. Ils sont réunis en partie basse par deux tubes horizontaux boulonnés qui vont jusqu’à l’axe de roue arrière. Une structure complexe qui ne devait certes pas manquer de rigidité.

Extrait du catalogue Dollar 1932.
La Super-Itala annoncée pour 1933 en Italie n’a malheureusement jamais vu le jour (source Storia della motocicletta de A.G. Luraschi)

La Dollar 750 T s’affiche à son apparition au salon 1932 à 7995 F alors que la 350 R4 monocylindre vaut 5 000 F et la 500 S4, 5 600 F. Cette fois il n’y a plus d’autre quatre cylindres française sur le marché que la 500 Train, deux stars dont les productions resteront confidentielles. La Train apparaît pour la dernière fois au salon 1933 après qu’il n’ait été produit que 3 exemplaires tandis que la Dollar 750 T encore exposée en 1933 avec une version très légèrementr revue avec un décor plus sobre et des échappement bas, quatre-en-deux. Pour comparaison la Dollar 750 T est affichée à ce salon 1933 à 9800 F alors qu’une Terrot 750 bicylindre en V à soupapes latérales ne vaut que 7500 F. Par contre il faut dépenser 11 800 F pour une BMW 750 R11 latérale et 12 800 pour la BMW R16 culbutée plus chère encore que la voiture Rosengart 5CV à 13 500 F. On ne la verra pas au salon 34 bien qu’elle figure encore au catalogue. Il semble qu’il n’y en ait eu que 7 produites et on compte aujourd’hui (presque) 4 survivantes dont celle magnifiquement restaurée celle du collectionneur alsacien Gérard Gruschwitz. Il s’y ajoute une autre version 32 non restaurée dans sa grange, un modèle 1933 à échappements bas attelé d’un side-car et dans le fin fond des Vosges un moteur qui sert toujours à actionner une scierie, mais ne me demandez pas les adresses, je ne les connais pas !  Cela constitue quand même un beau pourcentage.

Cette version attelée présentée au salon 1933 se distingue par son réservoir chromé et ses deux échappements qui se rejoignent de chaque côté en un seul silencieux « queue de carpe » en tôle. (photo de presse-agence Rol)
La petite fille a du bien grandir depuis cette photo colorisée qui date un peu. Nous amènera-t-elle un jour cette version attelée de 1933 qui ressemble fort à celle exposée au salon la même année. (Source inconnue !)
Quelle révolution à ce salon de Paris 1930 au Grand Palais où les vedettes sont quatre motos à quatre cylindres à 100 % Françaises. Impensable et inattendu, la France si longtemps absente au niveau international s’apprête-t-elle à repartir à l’attaque d’une place depuis longtemps perdue ?   Photos et archives François-Marie Dumas sauf mention contraire - Ciquez [...]

Vieilles Terrot et champagne

On voit trop souvent des réunions dites de machines anciennes où les « newcomers » sont la majorité, mais il existe encore des clubs intégristes (c’est exceptionnellement une qualité !) qui ne font rouler ensemble que les vraies vieilles et on ne peut que les féliciter. Les 11 et 12 septembre, c’était la rencontre annuelle du Terrot Club de France  à Brasles dans l’Aisne aussi connu pour sa production de champagne.

En bref et en chiffres 130 inscrits et 80 motos des années 20 aux dernières 500 RGST avec quelques « étrangères » quand même, une 1000 AJS de1939, deux Tornax et une 175 Sport Motobécane, mais 76% du plateau était composé de Terrot et de Magnat-Debon, l’honneur est sauf. Étrangers, mais en Terrot, un Italien, un Belge et quatre Allemands, dont le président du club des Terrot et autres françaises d’outre-Rhin, venus tout droit de Berlin.

À noter aussi quelques participants représentant les autres club Terrot, Arbracam en tête : une bonne entente inter clubs qui fait plaisir à voir.  Je vous fais l’impasse sur les commentaires du style, il a fait beau, on était content, on a bien rigolé, et sur les (rares) galères qui émaillèrent les 125 km de la balade. D’abord vous n’aviez qu’à venir et, si vous voulez rajouter vos noms aux quelque 260 membres du TCF  pour participer à la prochaine rencontre, il vous suffit de cliquer sur le lien !

Comme la baguette ne le montre pas, cette RGST de 1949 venait de Berlin.
Une bien rare Magnat Debon. Cette 175 LMC de 1955 (et encore plus rare badgée : Terrot S2T) et animée par un moteur Radior est une Nervor habillée à Dijon. En effet, le cadre vient aussi de Bourg en Bresse, la patrie de Radior/Nervor. Porte bagage et repose-pieds proviennent des Terrot RGST, et ne sont spécifiques que la roue arrière et la monstrueuse boîte ovale qui laisserait supposer qu'il peut y avoir besoin de beaucoup d'outils....
En décembre 1948, la 350 Terrot HT à soupapes latérales adoptait la fourche télescopique à (léger) amortissement hydraulique.
En 1934, est marqué chez Terrot par le semi-bloc moteur à boîte 4 vitesses sur les 350 et 500 culbutées et la 750 VA et l’apparition du réservoir Laiton merveilleusement mouluré.
Cette 500 RSS était la version haut de gamme.
Gnome & Rhône 125 R4S de 1957. Malchanceuse cette fois, cette Gnome est pourtant une habituée des grandes balades, car je l’avais déjà vue au Tour d’Auvergne. Notez le caoutchouc de rappel supplémentaire de l’amortisseur arrière (c’est d’origine) et le tirant reliant l’axe du bras oscillant à l‘attache supérieure de l’amortisseur qui est une amélioration du propriétaire.
AJS 1000/2 de 1934, un sublime grande routière britannique avant tout destinée au side-car.

-news-

On voit trop souvent des réunions dites de machines anciennes où les « newcomers » sont la majorité, mais il existe encore des clubs intégristes (c’est exceptionnellement une qualité !) qui ne font rouler ensemble que les vraies vieilles et on ne peut que les féliciter. Les 11 et 12 septembre, c’était la rencontre annuelle du Terrot Club [...]