Bath MAT, mais qu’est-ce ? Sur, vous ne l’avez pas croisée dans le rue. Ce prototype créé à Prague en 1928 et 29 par Milos Bondy voulait être le haut de gamme Tchèque sur deux roues.Trop chère, hélas, la belle ne passa pas le cap des préséries de 1929 à 1932.
La belle MAT s’annonçait en effet pour un tarif prohibitif et sa mise au point, aussi longue que parsemée d’ennuis techniques, eut raison du projet qui, pour ne rien arranger, arrivait en pleine crise économique.
Son initiateur, Milos Bondy, n’est pas un inconnu dans l’histoire de la locomotion tchèque et s’est rendu célèbre avant-guerre avec sa société Avia qui fabrique des avions biplans à moteur sous licence Hispano-Suiza. Il terminera sa carrière dans les années 70 en fabriquant sous licence des camions Saviem. Mais revenons à la moto. Milos Bondy s’y essaie en 1928 avec un 500 monocylindre baptisé de ses initiales M.B et dont les soupapes culbutées sont actionnées par une came à plateau similaire à celle des moteurs Soyer de la même période. Il développe 14 ch à 4000 tr/min, plus que n’en avouera la 500 quatre cylindres qui va suivre.
Milos Bondy veut faire mieux et rêve d’un quatre cylindres. Deux ingénieurs sont en charge du nouveau projet, Jaroslav Šlechtu, déjà impliqué dans la réalisation de la 500 M.B. monocylindre de 1928 et Františka Votroubek, ingénieur débauché chez Walter, constructeur réputé d’autos, de motos et d’avions. La MAT quatre cylindres est présentée à peine un an plus tard au salon de Prague 1929. Après deux ans de développement, elle est finalement homologuée en 1931… et disparaît définitivement en 1932 avec une production estimée à 25 exemplaires.
Contrairement à ce qui a été écrit de bonne foi par les rares personnes qui ont parlé de cette machine sans en avoir eu la documentation révélée aujourd’hui, il ne s’agit pas de quatre cylindres en carré comme l’Ariel Square Four, mais de quatre cylindres en ligne où, pour rendre le moteur le plus compact possible, ses concepteurs ont disposé un arbre à cames de chaque côté de la ligne des cylindres. Les soupapes latérales des premier et quatrième cylindres sont à gauche, tandis que celles des cylindres centraux deux et trois sont à droite. Cette disposition curieuse permet d’avoir toutes les soupapes d’échappement aux quatre coins, donc mieux refroidies. Deux sorties d’échappements deux-dans-un flanquent élégamment chaque côté du bloc cylindre et comme les quatre cylindres alternent leur disposition, — un avec échappement à droite, puis un avec échappement à gauche — les chambres de combustion typiquement asymétriques sur un moteur à soupapes en chapelle font croire à un quatre cylindres en carré tant qu’on n’a pas vu le moulin ouvert. Plus simple, l’admission s’effectue par une simple pipe centrale et un seul minuscule carburateur Amac, ce qui explique tant la faible puissance que la grande souplesse de la MAT.
Le bloc-cylindres en aluminium, ce qui est encore rare à cette époque, est largement ailetté. Pour en améliorer le refroidissement, le concepteur a eu recours à un subterfuge en ménageant une circulation d’air entre les chemises fonte, ce qui n’empêchera pourtant pas les MAT de surchauffer gaiement. Faut dire que les pauvres gaz devaient avoir du mal à trouver leur chemin dans ce labyrinthe. Adepte inconditionnel des moteurs refroidis par air, Sohichiro Honda reprendra cette belle idée de circulation d’air interne sur ses voitures type 77 en berline quatre portes en 1969, puis type 9S coupé en 1970. Ces placides autos étaient en effet animées par un quatre cylindres en ligne de 1298 cm3 à simple ACT et avec un refroidissement pompeusement baptisé DDAC pour Duo Dyna Air Cooling system, c’est-à-dire comme sur la MAT, mais avec, en sus, un gros ventilateur en bout de vilebrequin pour forcer l’air. Le bloc moteur de la MAT, superbe, avec des lignes très nettes sans aucune excroissance se continue par le carter de boîte boulonné qui supporte dynamo et magnéto. Cette boîte est du type à cassette et s’enfile, toute montée, par l’arrière. Une plaque support centrale supporte d’un côté les deux arbres de boîte avec en bout leurs roulements externes à rouleaux qui viennent s’enquiller dans le bloc et de l’autre un pignon conique sur lequel va engrener le kick et les deux pignons de transmission primaire à taille oblique. Bel et astucieux assemblage qui explique aussi le prix prohibitif de la machine. La transmission à la roue arrière, moins moderne, s’effectue par joint flexible puis arbre et vis sans fin. Elle sera remplacée sur les ultimes modèles par le plus moderne couple conique emprunté à la 350 Praga. Les roues chaussées en Michelin sont interchangeables et, comme plus tard sur certaines Zündapp et Gnome et Rhône, les roulements sont dans le cadre et la fourche et non dans les moyeux. Côté partie cycle la grosse originalité du cadre double berceau sans suspension arrière est une massive pièce en fonderie qui intègre la colonne de direction (comme sur la 250 Panthette présentée par Granville Bradshaw en 1926) et dans laquelle s’emboîtent les deux tubes de l’épine dorsale et les deux tubes des berceaux. Hors normes, encore les tambours de frein latéraux ailettés ont un diamètre extérieur de 280 mm.
Pour de plus amples renseignements sur la BAT et toute la production motocycliste tchèque, la bible est écrite par Libor Marčik (en tchèque) en 5 et bientôt 6 magnifiques volumes à découvrir et commander sur son site http://www.libormarcik.cz – Sauf indication contraire, les photos de la MAT sont issues des archives du musée national de Prague
Fiche technique MAT 500 – 1929
Moteur quatre temps 4 cylindres en ligne monté sur silentblocs – 485 cm3 (alésage x course 45 x 76 mm) – vilebrequin sur trois paliers – 12ch/4200 tr/min — Soupapes latérales – Cylindres en alu chemisé – 1 carburateur Binks puis Amac – Graissage par circulation d’huile et pompe à engrenages — Allumage magnéto Bosch – Embrayage monodisque, commandé par poignée tournante à gauche et/ou pédale — boîte 4 vitesses par sélecteur au réservoir – Cadre double berceau tubulaire avec partie avant en fonderie d’acier – Fourche avant à parallélogramme type Webb à ressort central enfermé – Freins à tambour ailettés Ø 280 mm — Pneus Michelin 4,00 x 19 – Empattement 1460 mm – Hauteur de selle 680 mm – Poids à sec 155 kg –90 km/h.
On ne peut s’empêcher en détaillant ce projet tchèque de le comparer à la 500 B5 Motobécane quatre cylindres présentée au salon de Paris en 1929. Un projet fort similaire qui resta aussi sans suite pour les mêmes raisons de coût. Nous y reviendrons bientôt. (photos archives FMD-www.moto-collection.org)
Honda a également utilisé le même dispositif de refroidissement par air par circulation entre les cylindres sur ses voitures type 77 en berline quatre portes en 1969, puis sur le type 9S coupé en 1970.