
La Yamaha 250 YD2 en 1961 au salon d’Amsterdam

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La Yamaha 250 YD2 en 1961 au salon d’Amsterdam
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Bien souvent les bouquins sur la moto sont avant tout informatifs, sans briller par une plume alerte et peu mis en valeur par une mise en page vieillotte. Autant de raison de vous réveiller les sens avec le JBB concocté par Yves Kerlo avec l’assistance de Bruno des Gayets pour les images et Jérôme Paillet pour la mise en page. C’est beau, c’est vivant, l’histoire est passionnante et si bien racontée qu’on a l’impression d’une discussion en réel avec l’auteur. j’ai dévoré l’ouvrage en à peine deux heures… mais j’y reviendrai pour rentabiliser l’affaire et me pencher sur les détails.
Voilà que l’impression générale me fait oublier de parler du sujet : JBB. Dans cette période extraordinaire de la moto en France des années 70 à l’aube du 21e siècle, nous avons eu la chance d’avoir un foisonnement de concepteurs et techniciens géniaux dont le talent eut un retentissement mondial même si tous n’ont pas toujours eu les moyens d’exprimer totalement leur potentiel. Eric Offenstadt, Pierre Doncque, Bernard Droulhiole, Alain Chevallier, Claude Fior et Jean-Bertrand Bruneau furent les moteurs de ces feux d’artifice dans les motos de course françaises et il faut leur rendre hommage.
JBB, on se souvient surtout de son curieux train avant à triangles superposés, et des succès acquis avec cette technologie, mais le livre nous rappelle que pendant près de 50 ans JBB, le dentiste, a également conçu des moteurs, des cadres, des casques, des vélos et des motos électriques.
Le livre d’Yves Kerlo qui a notablement participé avec sa société Reflex aux réalisations de JBB nous fait aussi revivre toutes les rencontres et collaborations avec les ^personnages qui ont fait l’histoire de la moto française dans ces années : Jean-Sylvain Dupré, le brillant technicien associé à Yves, Jean Buchoux et son entreprise JPX, Jacques Bolle, Georges Martin, Michel Robert qui lance JBB dans le Championnat de France Protwin, Cyrill Bihr qui soutient le projet MetisS et puis des designers comme Yves Malka concepteur de la fabuleuse Atomo, Jeann-Michel Tarallo auteur de la si belle et futuriste RenNa, moto routière unique sur base de Ducati 996 et Jeremy Faraud, auteur de la Temo (Terra Modena). Vous l’aurez compris, ce livre fait partie des indispensables.
Édité en 2022 et distribué par Café Racer: Les éditions du Dollar, 19, rue de l’Odéon, 75006 Paris – Format 26 x 28,5 cm, couverture cartonnée – 192 pages – 500 photos – 40 €
Le livre est à commander sur le site de Café Racer – ISBN 978-2-9576836-2-8
Et pour en savoir plus tous les autres ouvrages sur les motos françaises, reportez-vous à la rubrique livres dans le menu en haut de page.
Les Coupes, enfin retrouvées, restent fidèles à leur réputation : monumentales ! Entre les clubs, la bourse, les participants installés tout autour du circuit et les motos de prestige dans les box…, on a du mal à faire un tour complet en une seule journée. Cela dit, on note d’année en année un rajeunissement progressif du plateau avec de plus en plus de motos des années 70-80 et de moins en moins d’anciennes. Il faut avouer que les avant-guerre n’étaient pas gâtées par le programme de roulage avec quelques tours de circuit le samedi à 8h50 pour les plus de 175 cm3 puis à 8 h 30 et à 17 h 05 le dimanche. Il est dur de contenter tout le monde avec autant d’engagés, mais le résultat risque fort d’être une désaffection croissante des avant-guerre à Dijon-Prenois. Les Coupes marquent aussi un peu le pas ; presque, autant de participants que les années précédentes et plus de visiteurs selon l’organisation, mais, tous comptes faits, moins d’exceptionnel, ou peut-être suis-je blasé, car j’ai l’impression de n’avoir rien découvert que je n’avais déjà vu. Il faut dire que les Anglais étaient beaucoup moins nombreux et cela fait un sacré trou. On apprécie enfin la part belle faite aux petites cylindrées avec un circuit qui leur était spécialement réservé.
Côté course
Du côté des anciennes et des clubs
On croyait que ce n’était pas possible, et bien si, et ils l’ont fait. Cette 6e édition du Vintage Revival à Montlhéry était encore plus fantastique que celles qui l’ont précédé. Faut dire que, Covid aidant, on l’avait attendu plus que de coutume. 280 automobiles plus étonnantes les unes que les autres et plus de 206 motos inscrites dont 95 d’avant 1919 et d’exception et sans compter toutes celles venues en visiteur. Les Allemands, les Suisses et, si, si, même les Anglais l’affirment , on a jamais vu ça ailleurs !
Cocorico et merci à Vincent Chamon, à Jean-Pierre Olayat et aux 97 bénévoles de l’équipe qui les aident à gérer l’affaire. Tout était parfait, du classement à l’entrée du parking, aux commissaires de piste ou à Igor Bietry, le remarquable speaker et une caractéristique constante, chez eux comme sur tous les participants et visiteurs, une banane inamovible ! de quoi attraper un coup de soleil sur les dents.
Comment raconter un tel amoncellement de machines extraordinaires ? Le mieux que je puisse faire est de vous en présenter un maximum de photos, et comme il n’est pas possible de faire à la fois une publication rapide, et des historiques complets de chaque machine, n’oubliez pas de vous reporter aux fiches et aux articles du blog où une grande partie de ces motos son disséquées. Pour les autres, un peu de patience, un bon nombre devrait sans tarder apparaître dans les fiches qui ne cessent de croître et de se perfectionner.
L’année Motosacoche
En voiture, comme en moto, une marque est spécialement mise à l’honneur au Vintage Revival. Pour les automobiles, c’était cette année BNC et pour les motos, on fêtait les Motosacoche, l’une des marques ayant eu par ses motos et surtout ses moteurs MAG l’une des plus grandes diffusions en Europe.
Non, ce n’est pas un collectionneur distrait qui a garé par erreur sa Brough Superior sous le chapiteau dédiée aux Motosacoche ! Après l’échec de sa 1000 V4 présentée au salon de Londres en 1927 et dont le développement fut abandonné, George Brough, qui veut sa quatre cylindres de haut de gamme, commissionne Bert Le Vack recordman multiple devenu ingénieur en chef chez Motosacoche, pour concevoir un nouveau projet de Brough Superior, la « Straight Four ». Ce sera ce quatre cylindres en ligne d’aspect très net. Les soupapes sont latérales et la transmission s’effectue par arbre et couple conique. La moto est présentée au salon de Londres de 1928 et le développement se poursuit avec quelques problèmes, en particulier de serrage des pistons arrière. Rien d’irrémédiable, mais malheureusement Bert Le Vack se tue lors d’un essai pour Motosacoche en 1931 et cette 900 ne sera jamais produite. Jusque dans les années 70 seul un moteur avec un carter explosé remplacé par un modèle en bois et la boîte de vitesses étaient conservés par la famille de George Brough. Cette « base de restauration » a été revendue il y a quelques mois en Grande Bretagne à Wilcox Howard et la 900 Brough Superior Straight Four, pas encore totalement terminée, fait ici une de ses toutes premières réapparitions publiques depuis 1928.
Au Top Mountain Museum, une moto est mise à l’honneur chaque mois et il s’agit en Avril, d’une réalisation française pour le moins originale, La Charron de 1927 (mal datée de 1933) où cadre, fourche avant et accessoires sont entièrement réalisés en bois. Quelle meilleure place pouvait trouver cette Charron que dans un musée, lui aussi entièrement construit dans le même matériau ! Cerise sur le gâteau, cette Charron est animée par un rarissime moteur Voisin qui n’est pas dû à Gabriel, mais à un Voisin d’à côté et sans aucun rapport qui, lui, se prénomme René-Albert.
Photos Top Mountain Museum sauf mention contraire
Le créateur, Jean-Paul Charron, charpentier de profession, rêvait depuis longtemps d’une moto, mais sans en avoir les moyens de se la payer. Son nom était prédestiné, un maître charron était par définition spécialiste du bois et du métal. Pas de problème, il décide de se la construire lui-même en utilisant ses connaissances et son matériau usuel, le bois. Il choisit le noyer qui lui semble réunir les qualités requises en résistance et stabilité dans le temps. Quelques additifs métalliques indispensables sont rajoutés à cette partie cycle ligneuse : un moteur Voisin 350 cm3 à soupapes latérales, une boîte Picard 3 vitesses et des réservoirs d’essence et d’huile faits main comme le cadre.
Et ça marche car il se dit que la Charron en bois roula jusqu’en 1961 !
Tout étonne sur cette moto. Le moteur Voisin pour commencer avec sa culasse à deux étages (voir encadré).
La boîte de vitesse à 3 rapports par levier direct est une rare Picard semblable à celle montée sur les Motobécane 308 de la fin des années 20 (sur cette Charron on aurait évidemment préféré une Bridier-Charron !).
Le réservoir d’essence est en deux parties avec entre les deux un coffre pour les outils.
L’autre Voisin
Le moteur Voisin qui équipe la Charron a été produit de 1927 à 1929 par la S.A des Ets. Voisin et Cie fondés par René Albert Voisin, sise à Levallois-Perret, rue Antonin Raynaud et qui n’a aucun rapport avec Gabriel Voisin et ses différentes réalisations pour l’aéronautique ou ses projets pour Gnome & Rhône. Ce Voisin-là ne produisit que ce monocylindre quatre temps à soupapes latérales ou culbutées. Il reprend les mêmes cotes longue course (71 x 88 mm) que les Blackburne et LMP et équipera dans sa version latérale l’Austral type V de 1928-29, La DFR de 1927-28 (avant que la marque ne soit reprise par Dresch) et la CP Roléo C4SL de 1928 (une marque habituée aux motorisations exotiques puisqu’elle utilisera aussi des Harrissard, des Pauvert, des LMP et des JAP-Staub). Ce rare moteur Voisin à soupapes latérales se distingue par sa « double culasse » où un chapeau en aluminium qui reçoit la bougie est boulonné au-dessus de la classique culasse en fonte. Voisin réalisa aussi une version à soupapes culbutée de son 350 (utilisé par DFR) et projeta également en 1928 un 250 cm3 deux temps dont on doute qu’il n’ait jamais été produit.
Pour plus d’informations, je ne saurais trop vous recommander le remarquable historique sur les Ets de René Albert Voisin publié sur le site des motos Austral.
Un peu de patience avant de vous lancer dans le grand voyage pour aller visiter le Top Mountain Museum, car il prend ses vacances du 24 avril au 20 mai 2022. Après le dramatique incendie en 2021, le plus haut musée du monde à 2175 m a réouvert en novembre pour la saison de ski, avec un tout nouveau et somptueux local de 4500 m2 où sont exposées 500 motos, de préférence rarissimes, appartenant à 120 marques différentes. Le blog y revient bientôt.