250 BSA Sunbeam, Triumph Tigress: l’autre twin anglais

Edward Turner, dont le génie créatif et le sens du marketing ont fait tout le succès des bicylindres Triumph, a une moins bonne idée lorsque, promu directeur du groupe BSA-Triumph, il veut en 1958, appliquer au scooter la formule qui lui a si bien réussi avec la moto.

Photos er archives © F-M Dumas/Moto-Collection.org

Séance photographique pour la publicité du Triumph 250 TW2 Tigress en 1958. La ravissante demoiselle (que l’on retrouve sur le prospectus) vient d’une agence de mannequins, mais le pilote est le jeune ingénieur Bob Trigg. Il dessinera plus tard la suspension Isolastic de la Norton Commando puis travaillera une trentaine d’années avec moi au Product Planning et au service R/D de Yamaha Motor Europe.

Autant sa Speed Twin de 1937 était prémonitoire, autant les scooters, baptisés Sunbeam chez BSA et Tigress chez Triumph, arrivent après la bataille.

Ils sont lancés au Salon de Londres fin 1958 en deux versions, Sunbeam B2 (ou Tigress TW2) avec un 250 cm3 bicylindre culbuté, et B1 (Tigress TS1) en 175 cm3 monocylindre deux-temps. On espère chez BSA que cet engin va faire oublier le coûteux échec du Beeza, un fort beau scooter de 200 cm3 présenté en 1955 et qui ne sera finalement jamais produit.

Le groupe voit grand et prévoit une production annuelle de 50 000 unités pour ces quatre versions, avant tout destinées à l’export.

Malheureusement, les grandes heures du scooter sont comptées. Les Tigress et Sunbeam disparaîtront des catalogues, en 1964 pour les 250, et un an plus tard pour les 175. Sur le tard, ils auront été équipés d’un démarreur électrique et d’une seconde batterie (sur le 250 S) tandis que la 175 se verra doublée d’une version Junior limitée à 5 ch.

La Triumph 250 TW2 Tigress de 1958 exposée au musée national de Birmingham.
À gauche, le BSA Sunbeam 250 S au Salon de Genève 1960 avec un démarreur et une prise auxiliaire… pour brancher son rasoir, entre autres ! À droite, ce n’est pas cette fois un mannequin, mais une vraie Anglaise de rue surprise sur son BSA 250 Sunbeam.
L'avant du BSA 250 Sunbeaum est certes plus élégant que l'arrière.
Nettement plus … attrayante l’affiche BSA du Sunbeam « scintillant » met néanmoins l’accent sur les accessoires sacoches et grand pare-brise tandis que le prospectus du Tigress vise la femme au foyer avec son sac de course. Les détails qu’on aime avoir, mais qui ne font pas vendre.
BSA 250 Sunbeam B2

Techniquement, ces Sunbeam et Tigress sont aussi modernes que sophistiqués. La colonne de direction est boulonnée sur le classique cadre en tubes et supporte une fourche avant télescopique aussi peu orthodoxe qu’ingénieuse développée pour pouvoir offrir des roues facilement interchangeables. Les deux bras de fourche sont du même côté, l’un contenant le ressort, l’autre l’hydraulique.

À l’arrière, le bras oscillant en aluminium directement articulé sur le moteur pour garantir une tension constante de la chaîne. Il fait également office également de carter intégral pour cette chaîne duplex de transmission secondaire (pas étanche quand même… on est en Grande-Bretagne !). Les roues sont chaussées en 3,50 x 10. Le cadre en tubes est on ne peut plus classique et l’habillage est en tôle d’acier.

Si le bloc-moteur deux-temps de la 175 tout à fait conventionnel utilise cylindre et culasse de la 175 Bantam Super, avec une boîte de Triumph 200 Cub, le twin, beaucoup plus original, révèle tous les efforts d’Edward Turner pour faire le maximum d’économie sur la construction. Une belle pièce de fonderie rassemble bas-moteur, boîte quatre vitesses et cylindres (chemisés fonte). L’embiellage forgé n’est monté que sur un seul roulement à billes côté transmission primaire ; et sur de simples bagues à l’autre extrémité du vilebrequin, comme aux têtes et aux pieds de bielle. La culasse unique est coiffée de tôle emboutie, il y a trois axes d’articulations de culbuteurs au lieu de quatre, un seul arbre à cames, un unique carburateur, etc.

Officiellement jugé « trop puissant » lors des essais à l’usine de Meriden, mais officieusement fragile et peu disposé à évacuer ses calories, le 250 cm3 sera limité à 5 500 tr/min, un régime étonnamment bas pour un moteur aux cotes aussi sportives (45 x 50,6 mm) !

Obstiné en dépit du peu de succès de ces modèles, Triumph s’entête dans le scooter et présente en 1962, le Tina, un 100 cm3 deux temps, économique et plus léger, qui ne plaira guère plus au public.

Fiche technique ici

Cette fourche télescopique tout à fait ingénieuse à deux bras du même côté pour faciliter les changements de roue. Le même concept a récemment été repris sur les deux roues avant du Yamaha Niken.
Edward Turner, dont le génie créatif et le sens du marketing ont fait tout le succès des bicylindres Triumph, a une moins bonne idée lorsque, promu directeur du groupe BSA-Triumph, il veut en 1958, appliquer au scooter la formule qui lui a si bien réussi avec la moto. Photos er archives © F-M Dumas/Moto-Collection.org Séance [...]

Quasar 1976-1985 : le rêve de la GT parfaite

L’été est fini, mieux vaut se couvrir. Comment faire si on tient à rester sur deux roues. Nombre de constructeurs depuis les origines se sont penché sur le problème et, dans l’histoire récente, le Quasar est l’un des exemples les moins pires.

Archives et photos ©F-M Dumas/moto-collection.org

 

Toujours curieux de découvrir de nouvelles technologies, c’est Jean-Claude Olivier qui est installé ici dans le Quasar.
En démonstration sur le circuit du Mans et en duo, s’il vous plaît… mais c’est intime !

Les constructeurs ont toujours rêvé d’un deux roues cumulant les avantages de la moto et de la voiture, mais la plupart des tentatives dans ce sens étaient toutefois dépourvues de toit que ce soient les Monotrace, les Majestic ou les Neracar

Seuls Arnold Wagner avec ses très chères et efficaces Peraves Ecomobile, BMW avec son scooter C1 apparu en 1999 et dans une moindre mesure Adiva la même année, osèrent tenter le pari du deux roues couvert. Fervents adeptes des extrêmes les Britanniques nous ont habitués à donner soit dans un traditionalisme excessif, soit dans un futurisme, pas toujours assumé. Ne leur jetons pas la pierre, le Quasar qui se révélera invendable était pourtant parfaitement bien étudié. Il fut imaginé dès la fin des années 60 par Malcom Newell spécialiste en aéronautique et néanmoins motard. Malcom Newell rencontre en 1969 Ken Leaman, ingénieur chez Wilson & Sons, une petite société de mécanique établie près de Bristol qui va accepter de financer l’étude et la construction. Le premier Quasar est vendu en décembre 1976 et les deux compères prévoient une production mensuelle de dix Quasar, mais il n’en sera produit que six de décembre 1976 à décembre 1979. La production est ensuite reprise sous licence par Romarsh avant de faire faillite à son tour fin 1981. Au total il n’aura été commercialisé que 21 Quasar à moteur Reliant alors qu’il bénéficiait pourtant d’une publicité fort bien orchestrée et de participations à maints salons et évènements. Obstiné, Malcom Newell racheta le stock de pièces et produisit ensuite quelques exemplaires animés cette fois par des moteurs de moto, Suzuki GS, Honda VT 750, Kawasaki Z 1300, Honda Gold Wing etc. Newell travailla ensuite sur un projet de trois roues inclinable façon Piaggio MP3 ou plutôt Yamaha Niken avec carénage intégral et toit. mais il disparut prématurément en 1994 âgé de 54 ans.

Cliquez sur les petites photos ci-dessous pour les agrandir.

Au salon de Londres de 1977, Quasar présente ce prototype de « série B Sports », avec une carrosserie allégée et modernisée.
Ce Quasar série B aurait du être un nouveau modèle en 1977 : spoiler sur le toit, double sortie d'échappement hauts et empattement réduit

Automobile et vieillot, mais toutefois en alliage léger, le moteur emprunté aux voiturettes Reliant est un quatre cylindres de 848 cm3qui promet 40 ch à 5500 tr/min. Aérodynamique aidant il ne consomme moins de 4 l/100 km et permet au Quasar de friser les 180 km/h. La boîte à quatre vitesses est modifiée pour être actionnée par deux pédales et la commande de l’embrayage monodisque à sec est hydraulique. La transmission sur la roue arrière s’effectue par arbre et cardans et pont à vis sans fin. Le réservoir de 17 litres est placé sous le siège du pilote. Rigidement fixé sur une cellule en tubes d’acier Reynolds 531 de petit diamètre, la carrosserie en coin réalisée en polyester est très aérodynamique et, il faut le reconnaître, particulièrement bien étudiée pour minimiser les effets du vent latéral. La remontée sur l’arrière annihilant tous les remous. La sécurité n’est pas oubliée, le châssis-cage fait office de roll-bar et l’habillage de l’avant est conçu pour s’écraser en amortissant les chocs éventuels. Sécurité encore, l’arrière tronqué intègre trois tubes néon pour le feu et quatre ampoules de feu-stop. Le centre de gravité est très bas et tous les essayeurs du Quasar sont unanimes pour lui reconnaître une excellente stabilité à haute vitesse. La suspension avant est à roue poussée type Earles et l’arrière est un classique bras oscillant avec des amortisseurs Girling à gaz. Le freinage est confié à trois freins à disque fonte et étriers Lockheed, le nec plus ultra à cette période. On trouve même un coffre à bagages qui peut contenir deux casques intégraux, deux essuie-glace superposés et une radio cassette en option.

Pas de béquille centrale, mais deux robustes latérales qui se relèvent au moyen d’un levier à l’intérieur du cockpit.. S’installer au guidon demande une certaine accoutumance et le pilote est ensuite confortablement vautré dans une sorte de hamac avec les deux jambes bien en avant. Une position de conduite très automobile. Comme sur tous les exemples de grosses motos carrossées le plus délicat est de démarrer et de trouver son équilibre, le Quasar pèse quand même plus de 300 kg et son pilote n’est guère en position de le rattraper lors d’une fausse manœuvre (est-ce pour cette raison que la Police ne s’en est finalement pas équipée ?). Il semble que tout s’arrange une fois passés ces premiers errements. Nous vîmes de fait un Quasar démontrer une fantastique stabilité en grande courbe avec un angle d’inclinaison impressionnant (45 ° possibles avec les suspensions comprimées !) et son constructeur promet et démontre qu’il se comporte parfaitement même sur le mouillé avec la roue avant rivée au sol et un dérapage de la roue arrière qu’il jure très facile à contrôler en contrebraquant. On l’a vu faire, mais de là à ce que tout le monde en soit capable…  Cette GT théoriquement idéale peut même emmener une passagère à condition que ce soit un modèle de voyage, souple, pas trop grande et non claustrophobe, car il semble que derrière on ne profite pas trop du paysage !

Le stand Quasar est minimaliste au salon de Londres 1978.
Le Quasar démesurément long est pourvu de deux béquilles latérales qui se relèvent au moyen du petit crochet fil de fer visible à droite.(photo Paul Salvaire)
Un châssis-cage aussi léger que convaincant en tubes fin en Reynolds 531.
Salon de Londres 1980, Quasar tente même de séduire la Police avec cette version spéciale, mais imagineriez-vous deux grands Bobbies allongés là-dedans ! C’est ici Malcom Newell qui est aux commandes et vous noterez les sacoches latérales en option.
L'ultime tentative en 1985.
Tableau de bord et commandes très automobile.
L'été est fini, mieux vaut se couvrir. Comment faire si on tient à rester sur deux roues. Nombre de constructeurs depuis les origines se sont penché sur le problème et, dans l’histoire récente, le Quasar est l’un des exemples les moins pires. Archives et photos ©F-M Dumas/moto-collection.org   Toujours curieux de découvrir de nouvelles technologies, [...]

Scootavia : un si beau rêve

Le rêve éternel d’une auto à deux roues est une des nombreuses constantes de l’histoire : la voiture étant inaccessible après guerre, il fallait en donner l’illusion, et quelques « super-scooters » s’y essayèrent… avec maestria, sinon avec succès.

Vittorio Tessera dans son musée du scooter à Rodano près de Milan, a récupéré l'un des premiers, sinon le premier, Scootavia construit.

Passionné de technologie dés son plus jeune âge, André Morin, devenu ingénieur aéronautique, travaille dans le bureau d’études de Devoite Arado et Farman à Paris sur un projet d’hydravion capable de traverser l’Atlantique. La guerre terminée il dessine pour son compte un avion monoplace qu’il renonce à construire faute de moyens. Il se lance alors, en 1947, dans la construction de roues automobiles à jantes démontables en alliage léger (plus précisément, en Alpax un alliage de fonderie d’aluminium et de 13 % de silicium). De la roue au microcar il n’y a qu’un pas qu’il franchit en 1948… au niveau des études et de la publicité pour un fantasmagorique Aérocar, un trois roues à châssis en profilés d’Alpax habillés de feuilles de dural ou de plastique qui ne peut, hélas, voir le jour. Encore trop cher !

L'Aerocar étudié en 1948-49, cyclecar de 110 kg avec un Ydral 125 cm3 , promettait 50 km/h.

Puisque l’auto est trop chère, ce sera le scooter et cette fois le projet arrive à terme avec le Scootavia, « Scoot » comme scooter et « Avia » d’avion. Nez mis à part, les formes sont très inspirées par le Bernardet A48 présenté l’année précédente, à ceci près que le Scootavia conçu par André Morin est presque entièrement en alliage léger, à part justement ce gros nez fixe en tôle soudée. La plateforme de base en magnésium est assemblée au tablier avant du même métal par sept boulons de 8 mm. À l’arrière s’empilent, comme chez Bernardet, deux coques (ici en Alpax moins coûteux, mais moins résistant que le magnésium) articulées sur l’avant et surmontées d’un coussin biplace en caoutchouc alvéolé (encore un modernisme à l’époque). La coque supérieure fait office de réservoir d’essence et se soulève pour donner un accès rapide à la bougie. Si c’est plus grave qu’une perle ou pour une crevaison, il suffit de soulever la coque inférieure qui découvre toute la mécanique et la roue. Comme sur le Paul Vallée présenté la même année 1949, la suspension avant est télescopique dans la longue colonne de direction qui enferme le ressort. Un compas se charge de transmettre la direction… comme sur les trains d’atterrissage des avions… et le Gilera 195 CX de 1991 !

André Morin s’installe à Paris, rue Manin dans le 19e , où, assisté de deux ouvriers, il assemble les pièces commandées aux fonderies locales et à l’aluminium français et peint lui-même ses scooters au pistolet. L’entreprise démarre si bien qu’il finit par employer 17 personnes et annonce produire 10 Scootavia par mois. Il n’y en aura pourtant au total que 37 dans cette première série 1949-51 animée par un 125 cm3 Ydral. Curieux, les deux prospectus édités en 1949 et en 1950 sont identiques aux chiffres près ; le premier annonçant 55 kg, 75 km/h et 131000 F alors que sur le second le Scootavia est passé à 115 kg, et 95 km/h pour seulement 500 F de plus. Une affaire, non !

Ce n’est, hélas, pas assez pour passer à une vraie production en série. Des versions utilisant les 150 et 250 cm3 AMC ont bien été prévues et une publicité annonce même un Scootavia vendu en kit prêt à recevoir « tout moteur de 125 à 250 cm3 », mais cette vente à monter soi-même n’aura jamais lieu.

Vittorio Tessera nous montre l'assemblage des deux coques en Alpax. L'échappement passe dans la plate-forme inférieure en magnésium.
Le châssis et le tablier avant sont en magnésium et le moyeu de roue arrière à jante démontable peut se fixer à droite (AMC) ou à gauche (Ydral) en fonction du moteur choisi. (Doc. Frederic Tison)
Le châssis en magnésium et, à droite, la superbe fourche monobras en fonderie d'alliage léger des 1ere et 2e séries. Si vous connaissez le Gilera 125 CX de 1991, la ressemblance est frappante ! Documents Frédéric Tison
Le reste de la carrosserie est en Alpax et le nez en tôle d'acier.
André Morin en personne sur une des premières publicités pour le 175 AMC où la nouvelle coque ne possède pas encore ses ouïes d'aération du moteur. (doc Frédéric Tison)
Séance de pose où André Morin présente un prototype de la série 3 qui diffère notamment des modèles produits par ses suspensions. (doc. Frédéric Tison)

Autre projet avorté en 1951, un triporteur-taxi poussivement animé par le 125 Ydral et destiné à l’Indochine … en pleine guerre et certainement insensible à une construction aussi sophistiquée ! Mauvaise pioche, le projet capote et les finances ne s’améliorent pas. Ce projet de taxi indochinois séduit pourtant au moins un acheteur et André Morin reçoit une commande spéciale d’un propriétaire forestier pour, raconte le constructeur lui-même, « un véhicule à trois roues, deux places en tandem, dont l’une serait abritée pour emmener confortablement son épouse visiter l’exploitation forestière ».  Le châssis constitué de deux longerons en U se reprend sur la carcasse en Alpax de l’arrière du scooter. La porte « suicide », à droite, laisse un accès aisé à la cabine. Le système de direction est assez complexe et la colonne traverse le plancher de la cabine. « La direction est plutôt dure, et le manque de visibilité dû à la cabine en porte à faux important, ne met pas plus en confiance. Bref… la conduite relève un peu de l’aventure ! » avoue Claude Le Bihan qui a sauvé le prototype. Par rapport au taxi « indochinois », le pare-brise est en une seule pièce, et la partie arrière du tri est apparenté à la future série 3 de 1952 avec un 175 AMC qui arrive a emporter deux personnes malgré les 200 kg à vide, et quelques 3,00 m de longueur. En fait, le véhicule ne répondra jamais aux attentes de son client, et ne s’avérera pas très pratique dans les futaies avec ses 1,34 m de large…

Le projet de 125 Taxi-Pousse étudié en 1950-51 restera sans suite, mais André Morin réalisera plus tard un triporteur à moteur 175 AMC pour une commande spéciale. (Doc. F. Tison)
Le prototype de "tri-forestier" vers 1951. (photo Claude Le Bihan)

Fin 1951 est présenté le Scootavia 2e série qui passe au quatre temps avec l’excellent bloc 175 cm3 des Ateliers Mécaniques du Centre pourvu d’une turbine de refroidissement montée sur le volant magnétique.  Ouf ! Les 5,5 ch de l’Ydral avaient bien du mal à tirer les 115 kg finalement avoués par le Scootavia en alliages légers certes, mais de grande épaisseur ! Fort de 8,5 chevaux et bien assisté par sa boîte quatre rapports, l’AMC va mieux s’en tirer et friser les 90 km/h. Et ce n’est pas tout, ce Scootavia version 2 qui, avec 95 unités construites, va constituer l’essentiel de la production change autant esthétiquement que techniquement. La coque arrière plus effilée et d’une fonderie plus aisée (donc plus économique) est pourvue d’ouïes de refroidissement et n’a plus que deux grosses baguettes latérales au lieu de cinq petites. L’échappement ne passe plus dans le cadre. On y découvre aussi une suspension arrière monobras avec un ressort qu’on verra successivement placé au-dessus puis au-dessous du bras. Le grand luxe pour 225 000 F sans les options (montre, clignotants Labinal , roue de secours, pare-brise et même compteur !) alors qu’un Vespa au salon de Paris 1952 n’annonce que 85 kg et 134 000 F… dure concurrence ! A ce même salon le stand Scootavia indique « construction R. Petigat, licence André Morin » , mais il semble que la cession de la licence de fabrication à Mr Petigat n’ait pas abouti.  Fin 1952, Morin restyle une nouvelle fois son scooter. L’avant de cette 3e version est allégé avec un nez plus fin, un long parechoc et une échancrure permettant le braquage de la roue. Une plus grosse ouverture sur le côté de la coque arrière améliore la ventilation du moteur et la suspension avant abandonne son bras en alu pour un gros tube acier flanqué d’un ressort latéral.

Les ventes s’effondrent pourtant et cette troisième version ne semble avoir été produite qu’à 5 ou 6 exemplaires. Comme maints autres petits constructeurs, André Morin doit arrêter sa production en 1954. Il exercera ensuite ses talents d’ingénieur avec diverses sociétés jusqu’en 1982, où retraité, il reviendra à ses premières amours aéronautiques pour dessiner et commercialiser des plans d’ULM.

Environ 140 Scootavia ont été produits au total et le spécialiste passionné de la marque Frédéric Tison en recense aujourd’hui 18 plus un triporteur et une épave incomplète. (Pour un problème Scootavia, une seule adresse : Frédéric Tison – ftyson@free.fr (un i dans le nom, un y dans le mail)

La fiche technique et la description sont ICI

 

Ultime publicité pour le Scootavia série 3
Récemment restaurée, cette rarissime version de 1954 a un nez un plus fin dont la jupe est échancrée pour le braquage de la roue, et un parechoc plus long. Une large ouverture sur la coque aère le moteur et la fourche monobras a troqué l'alu pour un tube acier avec ressort latéral.
Très design années 50, le tableau de bord en alliage léger (ici sur la version 1954) comporte un compteur de vitesse et un logement symétrique pour une montre en option.
Un dessin un peu maladroit sur ces publicités de la série 3.
Les dessous d'un Scootavia V2 de 1952 montrent bien la suspension et la roue à jante démontable.
Le rêve éternel d’une auto à deux roues est une des nombreuses constantes de l’histoire : la voiture étant inaccessible après guerre, il fallait en donner l’illusion, et quelques « super-scooters » s’y essayèrent… avec maestria, sinon avec succès. Vittorio Tessera dans son musée du scooter à Rodano près de Milan, a récupéré l'un des premiers, sinon le [...]

Honda : 100 millions de Super Cub

2,5 millions d’exemplaires produits en 1962, 20 millions en mars 1992, 30 millions en 1997, 50 millions en 2005, et plus de 100 millions en octobre 2017. Le Honda Super Cub introduit en 1958 fête son 60e anniversaire et confirme depuis 25 ans sa position de véhicule le plus vendu au monde en ne cessant d’améliorer son record.

Le slogan qui lança le Super Cub aux États-Unis en dissociant la moto de son image Hells Angels, blousons noirs, etc.

On oublie souvent que, dans sa marche vers le sommet, Honda ne s’est pas contenté d’inventer la moto moderne. Et si la marque est devenue l’exemple technologique, à partir de 1955, avec ses 250/350 Dream SA/SB à arbre à cames en tête, ce sont de petites cylindrées économiques qui ont assuré les grosses rentrées d’argent nécessaires au développement de ces modèles de prestige.

Tout a commencé en 1952 avec le modèle F « Cub », un moteur auxiliaire de 50 cm3 greffé sur le flanc de la roue arrière d’un vélo. Grâce à cet engin rustique, Honda devient leader du marché national en 1953 et 1954 et l’usine en construit jusqu’à 7000 unités en novembre 1952, 70 % de la production totale de moto du pays ce mois-là !

Honda comprend très tôt que produire n’est rien si la promotion des ventes ne suit pas : il est le premier à courir à l’étranger (à Interlagos, près de Sao Paulo, en mars 1954), le premier à exporter aux États-Unis (en septembre 1954), le premier à offrir une garantie d’un an (en février 1956). Il a surtout assimilé que les modèles de haut de gamme (comme sa première bicylindre, la 250 C70 de septembre 1957) ne se justifient que si la production de masse autorise ce luxe et le Super Cub C100 d’août 1958 en sera le plus brillant et plus durable exemple.

Cet engin à mi-chemin du scooter et du cyclomoteur, animé par un moteur quatre temps accouplé à une transmission semi-automatique, dépasse les 20 millions d’exemplaires en mars 1992, devenant ainsi l’engin de transport le plus commun du monde. Ce succès continue et, pour son soixantième anniversaire en 2017, le Super Cub, maintes fois copié, jamais égalé, passe le chiffre invraisemblable des 100 millions d’exemplaires produits. Il est décliné dans de multiples versions saupoudrées aujourd’hui d’accessoires un poil plus modernes, mais conservant toujours la structure de base de ses débuts avec un cadre poutre tubulaire habillé ou non d’une carrosserie en plastique, sous lequel est suspendu le bloc moteur.

Un des films publicitaires qui accompagnèrent le lancement du Super Cub sous le thème « Meet the nicest people on a Honda »

Le deux roues léger utilitaire est une longue tradition chez Honda. Ici le 50 Cub sur vélo dame en 1952.
Le Super Cub envahit rapidement le mode. IL est ici avec e 50 SS en 1963 sur un catalogue en espagnol destiné à l'Amérique du Sud.
La gamme 1967 pour le Japon.
En vedette au musée du Guggenheim pour l'exposition " The art of the Motorcycle " en 1998 à New York, ce 50 Super Cub de 1962 aux côté de la 125 CB 92 Super Sport de 1960 illustre bien la double approche du marché de Honda.
Classique, le Super Cub de 1967.
Sorti des usines de Honda Belgium en 1963, ce Super Cub C310 se targue d'être la première moto japonaise fabriquée sous licence par une filiale étrangère. Affublé d'un pédalier tristement obligatoire dans nos contrées, il n'aura guère de succès.
Super Cub C110, version spéciale 60e anniversaire, un futur collector.
Le Super Cub se décline dès les années 60 en versions trail (Hunter Cub) et voici la dernière édition présentée au salon de Tokyo, le CC 110.
Les Super Cub 2018 conservent leur apparence traditionnelle, mais héritent d'un phare à LED, d'un nouveau tableau de bord et de moteurs revisités en 50 et 110 cm3 en attendant une version électrique.
Le Super Cub inspire aussi les préparateurs de Café Racers comme en témoigne ce bel exemple dû à K-Speed et piqué sur le blog mini4temps.fr
L'ami Yves Kerlo réagit au reportage en m'envoyant ces deux photos d'un Super Cub gavé au nitro surpris il y a deux ans à Ballaugh Bridge et les amateurs n'étaient pas spécialement des p'tits jeunes ! Ça fait rêver non ?

… et pour en savoir beaucoup plus, c’est ici 

2,5 millions d’exemplaires produits en 1962, 20 millions en mars 1992, 30 millions en 1997, 50 millions en 2005, et plus de 100 millions en octobre 2017. Le Honda Super Cub introduit en 1958 fête son 60e anniversaire et confirme depuis 25 ans sa position de véhicule le plus vendu au monde en ne cessant [...]

Villa d’Este 2017: suite en images

Je vous ai présenté dans l’article précédent les grandes stars des motos du tour du monde présentées au concours de motocyclettes de la Villa d’Este, mais cinq autres classes s’exposaient aux côtés de cette catégorie phare. Résumé en images.

Un petit tour à la Villa d'Este voisine pour montrer au automobilistes enqcravatés qu'on sait aussi s'amuser côté moto.

Un petit tour à la Villa d’Este voisine pour montrer aux automobilistes encravatés qu’on sait aussi s’amuser côté moto.

Scooters des fifties : les autres

Cette catégorie réunissait quelques-uns des plus beaux scooters des années cinquante qui n’ont connu qu’un succès limité en dépit de leur valeur. La palme fut décernée à l’unanimité au 175 cc Bastert, le chef d’œuvre du designer français Louis Lepoix qui ne fut construit qu’à 1200 exemplaires. Ce superbe témoignage de la grande vogue des scooters GT dans l’Allemagne de l’après-guerre se distingue par une carrosserie entièrement en tôle d’aluminium et un grand luxe dans sa finition et tous les détails d’équipement. Il était présenté par le musée « Scooters & Lambretta » à Rodano près de Milan.  La seconde marche du podium fut occupée par le 175 Prina Oryx de 1951, une sorte de sculpture sur roulettes aux lignes très inspirées par l’aéronautique avec un petit côté sexy mis en valeur par le très bel emblème de la marque. À ses côtés et issu de la même collection Scarpetti, le 150 SAI Ambrosini de 1951, de lignes similaires et plus torturées, y ajoutait tout un kit d’accessoires d’époque dont un superbe transistor fixé au guidon. Si le Rumi 125 Scoiatolo, comme neuf, reçut le troisième prix, parce qu’il fallait bien faire un choix, les autres participants, le Salsbury 85, super scooter américain de 317 cc, le Gianca 100 Nibbio, concurrent malheureux du Vespa présenté en 1946 quatre mois avant lui, n’ont échappé aux podiums que par des détails.

Les liens en bleu renvoient aux fiches et descriptions techniques et, comme d’habitude, il faut cliquer sur les photos pour accéder au diaporama avec les légendes.

Scamblers nippons

La mode des scramblers qui revient aujourd’hui a inspiré cette rétrospective qui nous a permis de découvrir des versions fort peu courantes, car réservées pour la plupart au marché américain des années 60. La plus rare était sans conteste la Yamaha 305 cc bicylindre YM2C apportée par Peter Abelmann, qui ne fut produite qu’une année en 1967 avant d’être remplacée en 1968 par la 350 YR2C. Face à ce deux temps, la Honda 305 CL77 de 1967 est à mon sens l’une des plus belles machines de son époque. Ce modèle, introduit en version 250cc avec la CL72 en 1962, inaugurait un nouveau cadre en tube remplaçant ceux en tôle emboutie utilisés précédemment. Il laisse place en 1965 à cette 305 cc dont 66 757 exemplaires seront vendus en quatre ans. La comparaison était fort intéressante avec la Honda twin CL 350 beaucoup plus connue, exposée à ses côtés, mais c’est la Bridgestone 175 Hurricane bicylindre deux temps à distributeurs rotatifs de 1967 que nous retînmes pour la troisième place.

Japonaises rhabillées

Une bonne idée que cette catégorie réservée aux motos japonaises des années 70 revues et corrigées par les Européens, c’est pourtant celle qui prête le plus à la critique. Une exposition aussi prestigieuse que celle-ci ne doit admettre que des machines exceptionnelles et dans un parfait était d’origine et cette exigence doit être encore plus sévère pour les motos les plus modernes. Comme l’an passé, ce n’était malheureusement pas le cas pour certains des modèles présentés. La vedette était la rarissime Bimota HB1 de 1975, restaurée avec quelques accessoires d’époque dont on retient le beau réservoir d’huile en aluminium devant le carter moteur. On ne fera aucune critique à la Honda 750 Rickman, par contre la Egli 750 pêchait par un polissage un poil excessif.

Nouveaux Concepts

De nouveaux concepts et une nouvelle catégorie appelée à se développer dans le concours de la Villa d’Este, mais dont la définition gagnerait à être plus précise. Difficile de comparer une étude de style pour un modèle ayant été commercialisé depuis, une maquette futuriste préfigurant un avenir possible, ou une autre montrant une simple évolution d’une moto existante. Tous ces projets ont leur intérêt, mais ils ne jouent pas dans la même cour. En l’occurrence il était bien ardu de faire un classement dans cette catégorie qui ne présentait que quatre concurrents… cinq si l’on y rajoute le scooter électrique BMW hors concours. Le public qui lui aussi votait pour élire sa moto préférée (toutes catégories confondues) et le jury pour cette catégorie choisirent le Café Racer Ducati 800 réalisé par le bureau de design Ducati au sein de l’Audi Konzept Design de Münich. Une séduisante réalisation, attractive par ses détails, élégante et bien proportionnée sans toutefois apporter de révolution ou de réelle nouveauté. Le deuxième prix revient à un projet présenté par Kiska design de Salzbourg, le célèbre créateur des KTM qui signait ici une Husqvarna baptisée Aero Concept dont les lignes fluides tranchaient avec celles le plus souvent agressives et à angles vifs propres à ce bureau de dessin. Un drôle d’équilibre quand-même avec ce nez de carénage reporté très en avant tandis que l’arrière très court s’arrête au-dessus de l’axe de roue. Je ne suis personnellement guère séduit. Tous, par contre, s’accordaient à reconnaître la perfection du projet Desert Sled, concocté lui aussi par un bureau de design Ducati, mais cette fois chez le VW group of America. Parfait, fignolé dans les plus minimes détails, ce projet si sophistiqué en devenait irréalisable à un coût acceptable. Conçu et développé à peu près en même temps que le Scrambler Ducati récemment commercialisé, c’est un superbe exercice de style que ne peut prétendre être une vision d’avenir. Aprilia, enfin présentait une sorte de sculpture futuriste déjà vue dans les salons. Une magnifique expression des maîtres mots qui ont présidé à la naissance de la RSV4 : légèreté, mécanique, dynamique, cet exercice de style était toutefois trop loin de la réalité pour séduire.

Reste le scooter électrique BMW « Concept link » hors concours bien évidemment, car la marque est également organisatrice de l’évènement. Bien plus qu’un C-Evolution redessiné, c’est vraiment un nouveau concept qui nous laisse imaginer un gros scooter électrique plus tourné vers les besoins quotidiens des utilisateurs avec des rangements nombreux et pratiques même s’ils doivent se faire au détriment de la taille de la batterie, donc de l’autonomie. On aime ou non ses lignes futuristes et aiguisées, mais force est de reconnaître que le bureau de design BMW présidé par Edgar Heinrich a réussi un certain tour de force en arrivant à trouver un style autour d’un énorme caisson central contraint par l’électrique et de deux petites roues de scooter. On y trouverait même presque une certaine légèreté avec cette selle comme suspendue et les larges ouvertures dans le museau. Le jeu n’était pas facile.

Je vous ai présenté dans l’article précédent les grandes stars des motos du tour du monde présentées au concours de motocyclettes de la Villa d’Este, mais cinq autres classes s’exposaient aux côtés de cette catégorie phare. Résumé en images. Un petit tour à la Villa d'Este voisine pour montrer aux automobilistes encravatés qu'on sait aussi [...]