Hummer, vous le connaissez tous, c’est le plus monstrueux des 4×4 d’Outre Atlantique… et, paradoxalement, ce fut aussi le nom de la plus malingre des Harley-Davidson jamais produites.
Photos et archives fmd/moto-collection et Bourdache (zhumoristenouveau) – Les liens en bleu renvoient aux descriptions des machines concernées
À la fin de la Seconde Guerre mondiale, Harley-Davidson (comme Indian d’ailleurs) veut introduire un modèle économique pour attirer les jeunes, combattre la vogue des scooters et endiguer les importations européennes dont l’importance, pourtant encore modeste, irrite l’usine de Milwaukee. Rien de plus simple, Harley Davidson qui déjà copié l’Allemagne en 1941 avec sa 750 XA flat twin très très inspirée par la BMW 750 R71 va reprendre un modèle germanique en copiant servilement la fameuse 125 RT DKW de 1940 dont les plans sont tombés dans le domaine public au titre des dommages de guerre. Harley-Davidson est d’ailleurs l’un des premiers à présenter sa copie en novembre 1947. Il ne sera pas le seul à s’inspirer avec plus ou moins de créativité de la DKW. Ce sera aussi le cas, entre autres, de la BSA Bantam en Grande-Bretagne et de Royal Enfield avec la Flying Fea, de Minsk en URSS et de Suzuki et Yamaha au Japon avec respectivement la Colleda et la YA1 Acatombo.
L’Harley « Model 125 » est commercialisée en 1948 où pas moins de 10 000 exemplaires seront produits. Le moteur deux-temps à graissage par mélange, sans modifications notables par rapport à son modèle, annonce fièrement 3 ch. Il est installé dans un cadre simple berceau sans suspension arrière et doté d’une très frustre suspension à parallélogramme en tôle emboutie amortie par des anneaux caoutchouc façon Neiman (notez que de ce côté Harley grand spécialiste de la suspension obsolète, revient même sur certains modèles actuels au cadre rigide avec suspension parallélo type Hardtle). Seule originalité dans ce tableau, un capot de phare en tôle qui introduit un style dont Harley se resservira longtemps. Notons pour l’anecdote qu’il s’agit de la première Harley avec un changement de vitesse au pied associé à un embrayage à main alors que les gros twins sont alors encore fidèles aux vitesses par levier au réservoir et embrayage au pied. Bien pâle copie, donc que cette Hummer qui se distinguait cependant des équivalents européens et plus tard, japonais, par ses plus gros pneus de 3,25 x 19. Un an plus tard, en 1949, la 125 type S « invente » aussi le réservoir triangulaire qui servira plus tard de modèle aux 750 KR de compétition et aux Sportster. Chez Harley on innove peu, mais les mêmes plats sont souvent resservis.
Une vraie famille sous un faux nom
On inclue généralement sous le nom d’Hummer toutes les petites Harley, non seulement le Model 125 de 1948, mais aussi les Scat, Ranger, Pacer, Super 10, et Model 165. Tous ces modèles sont à dire vrai très proches, mais la vraie Hummer à porter cette appellation est le modèle apparu en 1955 et produit jusqu’en 1959 sans grandes modifications
Pour les amateurs de haute technologie, voici dans le détail les évolutions du monstre de Milwaukee.
En 1951, la fourche parallélogramme à anneaux caoutchouc est remplacée par une « Télé-Glide » télescopique. En 1953, le Model 165 « Super Ten » de 5,5 ch remplace le Model 125 et se pare d’un capotage de carbu ailetté en alu façon Jawa. En 1955, comme il faut faire face aux Japonaises qui pointent leur nez en Amérique, un certain Dean Hummer employé chez Harley donne son nom à une nouvelle évolution réduite à l’essentiel qui perd sa batterie au profit d’un volant magnétique, et du même coup son capotage de carbu, son avertisseur, ses clignotants et son feu stop. La baisse de prix qui en résulte ne suffira cependant pas à enrayer le déclin du modèle de moins en moins compétitif face aux petites nippones qui débarquent avec de meilleures suspensions, et surtout une fiabilité bien supérieure. Après quelques années de coma, la Hummer s’éteint en 1959 et cette même année Harley tente une autre voie avec son scooter Topper animé par un moteur conçu sur la même base, mais avec un cylindre horizontal accouplé à un variateur et nombre d’autres perfectionnements dont, c’est à peine croyable, une suspension arrière oscillante façon Guzzi avec deux gros ressorts sous le moteur (enfin sans hydraulique, faut pas exagérer !) baptisée « Glide-Ride ».
L’acteur et chanteur Edd Byrbes dont on se souvient du célèbre film Kookie de 1959 avec le duo fou : « Kookie, Kookie, lend me your comb« (Kookie, prêtes moi ton peigne !) pose sur l’ultime version du Topper en 1964.
En 1960, la Super 10 remplace à la fois le Hummer et le Model 165. La Honda 125 CB92 Benly lui porte hélas un coup fatal et la production s’arrête en 1961. Boudée en son temps, la grande famille des Hummer, se rattrape ensuite outre-Atlantique en réunissant quantité d’aficionados qui organisent même régulièrement des compétitions sur piste avec ces redoutables engins copieusement modifiés pour la circonstance.
Obstiné Harley remet le couvert en 1962 avec les Ranger 165 cm3 à échappement relevé et pneus TT et les Pacer, modèle luxe à sacoches et pneus flancs blancs puis Scat (échappement relevé et garde-boue avant non suspendu) de 175 cm3 avec un cylindre largement ailetté plus valorisant. Nouvelle « révolution » en 1963, les deux modèles survivants, Pacer et Scat dotés de la même suspension arrière que le Topper. Ils survivent jusqu’en 1965, remplacés l’année suivante par le Bobcat, habillé d’un ensemble selle réservoir en ABS comme sur la Superglide. Cette belle prouesse ne dure qu’un an. Harley n’abandonne pas pour autant l’idée de lutter sur son propre terrain avec la compétition étrangère. La marque achète ainsi en 1967 Aermacchi qui devient Aermacchi-Harley Davidson et connaîtra un incontestable succès, mais ceci est une tout autre histoire.
Mais bon sang, c’est bien sur… et je l’ai écrit en plus, décidément les sélecteurs au pied teutons ont inspiré Milwaukee
Super article
Une précision, la Hummer n’est pas la première Harley avec sélecteur au pied, la première c’est la 750 XA, flat twin, comme vous l’expliquez dans sa fiche technique
Edd Byrbes est-il le fils caché de Donald Trump ? Ou bien est-ce le contraire car tous deux ont la même coupe de douilles…