Quelques tranches d’histoire de la moto
avec une forte prédilection pour ce qui est curieux,
innovant ou inconnu et les dernières nouvelles de notre petit monde
Bonjour, Je suis à la recherche de la moto de mon grand-père et de ma grand-mère (une Terrot 250 FTC / FGC) d’après les photos ci-jointes. (Mon grand-père est mort pour la France le 14 juin 1940). J’aimerais acheter une moto complète, peut importe l’état mais il faut que ce soit le même modèle Merci d’avance. Eric Forgeois
Superbes photos en tout cas qui valent à Eric cette publication. Répondre sur info@moto-collection.org et je transmettrai.
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Bonjour, Je suis à la recherche de la moto de mon grand-père et de ma grand-mère (une Terrot 250 FTC / FGC) d’après les photos ci-jointes. (Mon grand-père est mort pour la France le 14 juin 1940). J’aimerais acheter une moto complète, peut importe l’état mais il faut que ce soit le même modèle Merci d’avance. Eric Forgeois Superbes [...]
On voit trop souvent des réunions dites de machines anciennes où les « newcomers » sont la majorité, mais il existe encore des clubs intégristes (c’est exceptionnellement une qualité !) qui ne font rouler ensemble que les vraies vieilles et on ne peut que les féliciter. Les 11 et 12 septembre, c’était la rencontre annuelle du Terrot Club de France à Brasles dans l’Aisne aussi connu pour sa production de champagne.
En bref et en chiffres 130 inscrits et 80 motos des années 20 aux dernières 500 RGST avec quelques « étrangères » quand même, une 1000 AJS de1939, deux Tornax et une 175 Sport Motobécane, mais 76% du plateau était composé de Terrot et de Magnat-Debon, l’honneur est sauf. Étrangers, mais en Terrot, un Italien, un Belge et quatre Allemands, dont le président du club des Terrot et autres françaises d’outre-Rhin, venus tout droit de Berlin.
À noter aussi quelques participants représentant les autres club Terrot, Arbracam en tête : une bonne entente inter clubs qui fait plaisir à voir. Je vous fais l’impasse sur les commentaires du style, il a fait beau, on était content, on a bien rigolé, et sur les (rares) galères qui émaillèrent les 125 km de la balade. D’abord vous n’aviez qu’à venir et, si vous voulez rajouter vos noms aux quelque 260 membres du TCF pour participer à la prochaine rencontre, il vous suffit de cliquer sur le lien !
Comme la baguette ne le montre pas, cette RGST de 1949 venait de Berlin.
Une bien rare Magnat Debon. Cette 175 LMC de 1955 (et encore plus rare badgée : Terrot S2T) et animée par un moteur Radior est une Nervor habillée à Dijon. En effet, le cadre vient aussi de Bourg en Bresse, la patrie de Radior/Nervor. Porte bagage et repose-pieds proviennent des Terrot RGST, et ne sont spécifiques que la roue arrière et la monstrueuse boîte ovale qui laisserait supposer qu'il peut y avoir besoin de beaucoup d'outils....
En décembre 1948, la 350 Terrot HT à soupapes latérales adoptait la fourche télescopique à (léger) amortissement hydraulique.
En 1934, est marqué chez Terrot par le semi-bloc moteur à boîte 4 vitesses sur les 350 et 500 culbutées et la 750 VA et l’apparition du réservoir Laiton merveilleusement mouluré.
Cette 500 RSS était la version haut de gamme.
Gnome & Rhône 125 R4S de 1957. Malchanceuse cette fois, cette Gnome est pourtant une habituée des grandes balades, car je l’avais déjà vue au Tour d’Auvergne. Notez le caoutchouc de rappel supplémentaire de l’amortisseur arrière (c’est d’origine) et le tirant reliant l’axe du bras oscillant à l‘attache supérieure de l’amortisseur qui est une amélioration du propriétaire.
AJS 1000/2 de 1934, un sublime grande routière britannique avant tout destinée au side-car.
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On voit trop souvent des réunions dites de machines anciennes où les « newcomers » sont la majorité, mais il existe encore des clubs intégristes (c’est exceptionnellement une qualité !) qui ne font rouler ensemble que les vraies vieilles et on ne peut que les féliciter. Les 11 et 12 septembre, c’était la rencontre annuelle du Terrot Club [...]
Le flat twin tente nombre de constructeurs au tout début des années 20, ABC, BMW, Douglas, etc ; mais, qu’ils soient en long ou en travers, tous ceux cités sont des quatre temps. En deux temps, les bicylindres, toutes dispositions confondues, arrivent bien tardivement à l’exception notable de Scott, le pionnier en 1908. Il n’y en a que deux au salon de Londres en 1920 et quatre en 1921 dont l’Economic qui dont je vais longuement parler dans cet article, car il fut, sauf erreur de ma part, le premier bicylindre à plat deux temps aux États-Unis, puis en Europe.
Les atouts d’un bicylindre à plat quatre temps sont évidents et justifient son succès depuis les premiers âges de la moto. Le vilebrequin étant calé à 180°, les deux pistons se meuvent en opposition et cela donne un temps moteur par tour avec un joli bruit caractéristique. Dans les premiers âges du deux-temps, la construction de moteurs refroidis par air au-dessus d’une certaine cylindrée posant de réels problèmes techniques, le multicylindre semble pourtant être la seule solution ! Le flat twin deux-temps s’impose pourtant moins qu’en quatre temps. Avec le même obligatoire calage à 180°, l’aspiration et la précompression dans le carter s’effectuent en même temps pour les deux cylindres, et on a une combustion par tour dans chaque cylindre, soit un gros double-temps moteur par tour. C’est bien pour l’équilibrage et le couple, pas trop pour le bruit qui est celui d’un monocylindre. En comparaison, un deux temps à deux cylindres parallèles, séparation du carter et calage à 180°, a, lui, deux temps moteur par tour, un pour chaque cylindre.
En bref :
1913 – 1921 : Johnson Motor Wheel 154 cm3 – USA
1914 : Connaught 350 cm3 – GB
1916-1919 : Terrot – Cuzeau 350 cm3 – FR
1919-1921 : Jonhson Motor Wheel / Economic – USA/GB
1921-1923 : Economic 161 cm3 – 2e version – GB
Johnson Motor Wheel 1919 (photo H. Descelier)
1919 : Terrot Cuzeau 350 cm3 : Hors concours
Comme un premier deux-temps étudié en Allemagne chez Victoria, le superbe Terrot étudié par l’ingénieur Henri Cuzeau de 1915 à 1919 est d’office éliminé de ce tour d’horizon de flat twins deux temps. Il s’agit en effet de deux-temps à 360°. Dans ce cas les pistons bougeant dans le même sens ne s’équilibrent pas et il n’y a pas de précompression, car ils restent à la même distance l’un de l’autre dans le carter. Terrot et Victoria ont résolu le problème en utilisant des pistons à double alésage, l’espace annulaire créé par l’alésage du bas étant utilisé pour l’admission et l’envoi du mélange dans la chambre de combustion.
L'unique survivant du Terrot-Cuzeau fait partie de la collection permanente du Musée National de la Voiture de Compiègne.
Trop complexe, sans doute, ce flat twin à doubles alésages resta au stade de prototype.
On parlera un autre jour de ces deux-temps à pistons à « doubles étages ». La question du jour, c’est qui remporte la palme d’avoir créé le premier flat twin deux temps « normal » et la lutte est serrée et confuse. Entre Johnson Motor Wheel aux États-Unis et Connaught en Grande Bretagne. Certes le Connaught est bien plus beau et bien plus technique, mais l’histoire n’en a guère gardé pour trace que sa présentation fin 1914 aussi la victoire revient-elle aux frères Jonhson, car leur flat twin sera réellement commercialisé avec un succès non négligeable aux États-Unis et sera même construit en Grande-Bretagne pour équiper une fort jolie petite moto.
1914-1915 : Connaught 350 cm3 en Grande-Bretagne
Autant le Johnson est rustique et sans finesse voire antimécanique avec ses bielles tordues, autant le Connaught, un bicylindre à plat de 350 cm3 présenté en Grande-Bretagne fin 1914, est technique, astucieux et très soigneusement réalisé, mais, dommage, on ne trouve apparemment plus sa trace après cette brillante présentation.
Le Connaught est tout à fait moderne en son temps. Le vilebrequin tourne sur roulements à billes. Les cylindres pénètrent profondément dans le carter moteur en aluminium. Ce moteur est solidement boulonné sur une longue semelle qui sert de silencieux et de partie inférieure du cadre. Pas besoin de tube d’échappement, la semelle-silencieux est directement appliquée sur la lumière d’échappement.
Une plus petite semelle sur le dessus réunit les transferts d’admission avant/arrière et sert de support à la magnéto. Dernier raffinement pour empêcher que le moteur ne passe en 4 temps à faible régime ou dans les descentes (mal chronique des premiers deux-temps,) une valve rotative entre le transfert avant où entre le mélange et le transfert arrière, coupe l’admission au cylindre arrière dans les cas mentionnés et le cylindre avant garde ainsi un rythme régulier.
1913 Johnson Motor Wheel 154 cm3 – États-Unis
C’est aux États-Unis courant 1913 qu’est développé pour la première fois un flat twin deux temps sous label Johnson Motor Wheel. C’est un petit 154 cm3 refroidi par air disposé en long sur un porte-bagages de bicyclette dont il entraîne la roue par une chaîne directe. Le manque de souplesse de ce type de transmission comparé à une courroie est compensé par un amortisseur de chocs constitué par des ressorts disposés entre la couronne dentée et la jante de la roue arrière. Les cotes de ce petit moteur sont étonnamment super carrées (51 x 38 mm), l’alimentation est confiée à un carburateur maison, B & B ou Mills et la puissance est estimée à ¾ de cheval avec une vitesse annoncée de 50 km/h.
Le dessin du brevet montre bien l’agencement des différents éléments avec toutefois quelques changements par rapport aux versions définitives. L’échappement est un deux-dans-un orienté vers l’arrière et le système « Spring drive » de suspension de la grande couronne arrière place ses trois ressorts entre l’intérieur de la couronne et le moyeu de roue et non entre la couronne et la jante de roue.
Un peu d’histoire :
Les frères Johnson Lou, Harry et Clarence Johnson créent la Johnson Brothers Motor company à Terre Haute dans l’Indiana et Louis Johnson construit en 1903 son premier moteur, un mono deux temps de 3 ch et 68 kg. Deux ans plus tard, le moteur amélioré ne pèse plus que 29,5 kg. La Johnson Brothers Motor developpe ensuite des 2 et 4 cylindres en ligne, puis un V4 pour l’aviation, mais leur usine est détruite par une tornade en 1913. Les trois frères redémarrent alors leur activité avec une nouvelle société, la Johnson Bros. Motor Wheel Company et une nouvelle invention, un petit flat twin deux temps adaptable à l’arrière d’un vélo. Ce petit flat twin a cependant un grave défaut il fait « brûler » sa magnéto plus vite que leur fabricant ne peut en fournir. Les frères Johnson se lient alors à la Quick-Action Ignition Cy, dirigée par Warren Ripple et vont s’établir ses côtés à South Bend, Indiana en mars 1918.
Revu, corrigé et breveté pour 1919, le flat twin s’est doté un moderne volant magnétique conçu par Quick-Action ignition Company. C’est le succès et le Johnson sera vendu à 17 000 exemplaires sous labels Johnson Motor Wheel, ou Economic. Et puis arriva la récession et surtout la concurrence de la Ford T à 365 $ alors que le Johnson Motor Wheel valait 97,50 $ en moteur seul et 140 $ avec sa bicyclette. Imparable ! et Johnson Motor Wheel Cy ferme boutique en 1921. Délaissant les deux roues motorisés, les frères Johnson retournent à leurs premières amours, les moteurs marins avec, devinez quoi ? Un flat twin deux temps tout alu qui développe 2 chevaux et ne pèse que 16 kg.
Publicité pour le Johnson Motor Wheel vers 1920 vendu 97,5 $ … l’apparition de la Ford T à 365 $ mettra fin à son succès.
Pour le moins rustique, le Johnson est conçu pour pouvoir être démonté avec seulement un tournevis. Des chapeaux de bielle à l’assemblage des carters et la fixation des cylindres, tout est confié à des vis à tête fendue de même dimension et « en ferraille à ferrer les ânes » précise un docte membre du Vintage Motorcycle Club britannique.
La coupe du moteur est présentée dans les journaux anglais et français en 1921.
Curiosité technique, certain diront aberration, les bielles ne sont pas droites, mais sont tordues et décentrées pour que les cylindres soient alignés. (Photos Kim Siddorn)
Le moteur Johnson ici sous label Economic au National Motorcycle Museum dans l’Iowa. Comme la grande majorité des constructeurs américains de motos Harley Davidson fabriquait aussi des vélos et ce kit moteur est monté sur une bicyclette HD, modèle 1918. Un étonnant mariage, car le distributeur du kit moteur « Economic » alias Johnson Motor Wheel, est Davis Sewing Machine Co, un célèbre fabricant de machine à coudre à Watertown (NY) puis établi à Dayton-Ohio, qui fabriquait aussi des bicyclettes depuis 1892, avec d’ailleurs tant de succès qu’il en abandonnât ses ‘sewing machines’ ; une mauvaise idée, car il fît faillite en 1924. Le seul côté high tech de cet Economic de 1920 est bien son volant magnétique.(photos Hugues Descelier)
Un Johnson Motor Wheel daté de 1919 sur vélo de dame au Barber Museum.(photo Hugues Descelier)
Le carburateur et le système d’échappement est encore différent. (photo Hugues Descelier)
1921-1923 : Economic 161 cm3 – Grande-Bretagne
Bien avant d’être grillé aux États-Unis par la Ford T, le flat twin Jonhson a découvert l’Europe de façon très anecdotique monté sur un porte-bagages de vélo et bien plus souvent dans l’armée américaine durant la Grande guerre où il entraînait des groupes électrogènes ou des pompes d’assèchement.
La société Economic Motors créée à Londres rachète, dit-on, ces moteurs aux surplus avant de devenir Eyneford Engineering Co Ltd à Eynsford dans le Kent et de se lancer dans la fabrication non seulement du moteur, mais d’une vraie petite moto.
On ne trouve aucune trace de l’Economic dans la presse britannique en 1919-20 et il ne figure pas dans la liste des exposants au salon de l’Olympia à Londres fin 1920 publiée par Motorcycling. Il en va tout autrement au salon de Londres 1921 où Economic présente son moteur auxiliaire en vantant sur son prospectus « l’énorme succès » de cet engin sans préciser que ceux-ci ont été essentiellement réalisés outre-Atlantique. Il est monté en long sur le porte-bagages d’un vélo en version ‘Standard’ à 18£ 17s 6d ou ‘De Luxe’ à 23£, avec la transmission par chaîne « Spring drive », inventée par Johnson avec six ressorts intermédiaires joignant 3 bossages sur la couronne dentée à six attaches sur la jante. Le kit complet avec vélo renforcé vaut 30£. C’est cher surtout en comparaison de la grosse surprise qui tient la vedette du stand Economic, une vraie moto proposée à un prix défiant toute concurrence et à peine plus onéreuse que le vélo avec son moteur auxiliaire : 34£ en version standard ou 37£ 10d avec boîte deux vitesses.
Les inépuisables fonds de la BNF sont là pour prouver que le Johnson Motor Wheel a bien roulé en Europe et même en France. Il est ici photographié par la célèbre agence Rol à la course de côte de Gometz-le-Chatel le 31 octobre 1920 aux mains de Pierre Labric. La version utilisée est parfaitement identique à celle montée sur un vélo de dame au Barber Museum
Le petit flat twin monté sur la moto a désormais une cylindrée de 161 cm3 avec des cotes encore plus super carrées que le 154 cm3 du moteur auxilliaire Johnson original puisque l’alésage est passé de 50,1 à 52 mm pour une course toujours de 38 mm. Le flat twin est disposé en long, à la Douglas, accroché très haut juste sous le réservoir dans un cadre triangulé en tubes droits plus qu’inspiré par celui que vient de présenter Cotton. La transmission ne s’effectue plus en direct à la roue. Une chaîne entraîne une boîte relai sous le moteur (avec deux vitesses en option) et une poulie trapézoïdale assure la transmission secondaire. Miracle du volant magnétique, l’éclairage électrique est aussi proposé en option (à une époque où l’éclairage acétylène est encore la règle). On note au passage la suspension avant pendulaire type Indian qui comprime un ressort horizontal au-dessus de la roue. « Le petit compagnon rouge » comme l’appelle sa publicité en raison de sa couleur ne vivra pourtant qu’un été.
Première mouture de l’Economic en 1921 (tiré à part à l’occasion du salon de Londres de la présentation parue dans le numéro de ‘Motorcycling’ du 16 novembre 1921): 34 £ seulement avec un versement initial de 10 £ puis six mensualités alors que le moteur auxiliaire avec son vélo est proposé à 30 £.
Le moteur disposé en long transmet sa (modeste) puissance par chaîne et courroie avec, au choix, une boîte deux vitesses ou non sur l’arbre relai. L’allumage s’effectue par un volant magnétique avec avance variable qui peut également alimenter un éclairage électrique. Les freins sont à patins sur jante et la suspension avant est pendulaire type Indian. Finition en rouge, lui vaut le surnom de « Petit compagnon rouge » sur le catalogue. (extrait de Motorcycling du 16 novembre 1921 - Archives Hockenheim museum)
L’Economic à friction
Dans ses reportages sur le salon de Londres 1921, la presse britannique parlait déjà 1921 d’un futur tricycle utilitaire animé par le flat twin de l’Economic et associé à un changement de vitesses par plateau de friction.
L’idée se concrétise aux salons de Londres et de Paris fin 1922 où apparaît une toute nouvelle Economic où tout change ou presque. Non, le moteur est le même, mais il est cette fois placé en travers et disposé plus bas dans un double berceau toujours en tubes droits triangulés, mais élargi pour protéger les cylindres de la boue comme des chutes. une vraie mini ABC !
La grosse nouveauté est ailleurs : un changement de rapport par plateau de friction(de 6 à 1 à 19,4 à 1). Un dispositif déjà utilisé par Ner-a-car, La Mondiale et quelques cyclecars. Succès d’estime, cette aguichante Economic à bicylindre en travers brillera au salon de Londres et même de Paris, mais dans le hall d’entrée seulement, car “inscrite trop tard pour avoir un stand”, elle ne fut toutefois diffusée qu’à un très petit nombre d’exemplaire et la marque disparaît en 1923.
L’Economic de 1922 conservée au National Motocycle Museum de Birmingham : une vraie « mini ABC ».
Superbe description du dispositif de changement de rapport à friction dans ‘La Revue Motocycliste’ du 10 juillet 1922. Un disque acier est accolé derrière le volant magnétique. Perpendiculaire à ce disque, un volant garni de fibres est maintenu en pression contre lui par un ressort de débrayage commandé par pédale. Un levier à main réglable sur dix positions commande le déplacement du volant sur son axe qui passe ainsi de la périphérie vers l’extérieur du plateau en sortie moteur. L’axe sur lequel coulisse le volant est pourvu d’une poulie à gorge pour la courroie de transmission vers la roue. Le carburateur unique n’est plus un B & B mais un Gapac.
L’Economic qui arrive trop tard à Paris pour être inscrite au salon de 1922. Elle sera néanmoins exposée, mais dans le hall d’entrée.
On verra sa publicité dans les numéros Spécial Salon de ‘La Revue Motocycliste’…
…et de ‘Moto Revue’ en 1922. On y lit qu’elle a effectué un Londres-Edimbourg en 22 h 27min. soit 700 km à 31,18 km/h de moyenne une vraie performance certifiée par l’ACU, sur les routes non bitumées telles que vous pouvez vous les imaginer à l’époque.
Le flat twin tente nombre de constructeurs au tout début des années 20, ABC, BMW, Douglas, etc ; mais, qu’ils soient en long ou en travers, tous ceux cités sont des quatre temps. En deux temps, les bicylindres, toutes dispositions confondues, arrivent bien tardivement à l’exception notable de Scott, le pionnier en 1908. Il n’y en a [...]
Artcurial a de quoi se frotter les mains avec 76 motos en majorité françaises et d’avant 1914 vendues pour un total de 2 042 000 € dont la Janoir 1920 en vedette à 145 000 €.
Les visiteurs en punition
Une vente tout à fait exceptionnelle, mais les pauvres visiteurs de Rétromobile étaient en revanche bien négligés. Il y avait bien sûr quelques motos éparses dans les stands, dont une Honda 6 ce qui n’est pas rien, mais désormais seuls les stands payants ont droit de cité à Rétromobile et l’organisation du salon se refuse à investir dans un plateau moto de prestige. Plus d’expo moto donc et pire, la fabuleuse collection présentée par Artcurial n’était pas accessible au public à moins d’acheter les très luxueux catalogues de la vente offerts à 100 € pour le kit autos et motos et à 40 € pour le livret de 120 pages ne concernant que les collections Guélon (les motos) et Broual.
Unique et à la pointe des meilleures techniques de son époque, la Janoir fit flamber les prix à 154 000 €, à ma connaissance le plus haut prix jamais atteint par une moto française. (photo Artcurial-Serge Cordey)
« Gants blancs » s’écrie hilare maître Poulain, en terminant la fameuse vente de la collection de Pierre Guélon à Rétromobile. « Gants blancs », c’est l’expression consacrée des commissaires priseurs pour signifier que tous les lots ont été vendus, ce qui est assez rare a fortiori avec les sommes relevées ici.
Adjugée à 154 000 € (plus 20% de frais !) la Janoir 1920, le seul exemplaire connu de ce fabuleux flat twin à cadre tôle et suspension intégrale de 1920, restera heureusement dans sa France d’origine en rejoignant l’Auvergne. Les deux tricylindres Buchet de 1905 et Anzani de 1906 partent par contre pour l’Allemagne de concert avec la Blériot à des prix respectifs de 47 000, 70 000 et 65 000 €. Dame, ce sont des prix qui commencent à compter. Jamais sans doute autant de motos françaises n’avaient été vendues ensemble à un tel niveau : 16 des 76 lots ont été adjugés à 40 000 € ou plus. La meilleure affaire fut sans doute la Dax 350, une version double échappement dans un excellent état qui partit à 12 000 € bénéficiant sans aucun doute de l’effet de souffle causé par l’extraordinaire combat d’enchères de la Janoir qui venait juste avant. La seconde plus grosse enchère concerne le tricycle Renaux un remarquable 500 cm3 à cylindre horizontal connu pour sa performance à la course Paris-Saint Malo en 1899 soit 372 km parcourus à 52 km/h de moyenne. Il fut adjugé sur un ordre par internet à 115 000 €. Les ancêtres de 1899 à 1910 aussi rares que parfois incomplets, mais toutes dans un jus d’origine, se sont négociés aux alentours de 20 000 €, un peu moins pour les Givaudan de 1902 et Hurtu de 1904, à 10 000 € ou la Lurquin-Coudert de 1903 à 7000 €, mais les Moto-Cardan montèrent à 34 000 pour la monocylindre et à 48 000 pour la bicylindre en V face à la route, remarquable première exploitation de cette disposition du moteur. Notons encore la Rochet bicylindre en long de 1907 à 65 000 € et la Werner bicylindre parallèle face à la route (une autre première mondiale) à 25 000. Les rarissimes Werner à moteur sur la roue avant se vendirent respectivement à 34 000 € pour la première de 1897 caractérisée par son nom de Motocyclette dont les frères russes sont les inventeurs et son petit réservoir-garde-boue pour la lampe à essence chargée d’alimenter l’allumage par incandescence. La version 1898 à deux volants extérieurs ajourés type machine à coudre partit à moins de la moitié, 16 000 €, et l’ultime modèle de 1899 à volant interne ne fit que 14 000 €… Je n’arrèterai pas ce longue liste sans cite la Pernoo de 1899 à moteur Labitte en porte-à-faux derrière la roue arrière ( 40 000 €) ou la célèbre moto signée par Henri Désiré Landru en 1903 avant qu’il ne se consacre aux dépeçage et brûlage de riches veuves, s’échangea à 10 000 € offerts par un fameux restaurateur mayennais. Au chapitre des adjudications hors normes citons encore la Majestic 350 à moteur Chaise de 931 pour laquelle le marteau s’abattit à 68 000 au profit de gros acheteurs hollandais qui récoltèrent quand même plus de 17 lots ! Les prix des très rares étrangères proposées, enfin, restèrent dans la norme : 47 000 € pour la très belle Saroléa 500 Monotube ex- Chevallier une version course dans tous ses accessoires et habillages, mais néanmoins équipée d’un moteur route (qui ne diffère guère que par son numéro, ses cames et son carburateur). 96 000€ seulement ( !) pour la Brough Superior SS 680qui pêchait par sa totale absence de numéro et 41 000 pour la Norton 500 Inter 30de 1932.
Notes : la datation des motos est parfois approximative – Les liens en bleu renvoient aux fiches descriptives des motos
C'est Olivier Midy créateur des Midual qui l'a dit "les plus belles motos françaises sont des flat twins en long avec un cadre coque !" (photo Artcurial-Serge Cordey)
Le tableau de bord de la Janoir.
L'autre grande vedette de la vente fut ce remarquable tricycle Renaux de 500 cm3 à refroidissement liquide qui remporta les 372 km de la course Paris-Saint Malo en août 1899 à 52 km/h de moyenne. Un palmarès qui le fit vendre 115 000 € (enchère par internet).
La bonne affaire de la vente ! Cette rare Dax 350 à double échappement de 1933 ne monta qu'à 12 000 €, éclipsée par la vente précédente de la Janoir. Ce sont des Hollandais qui en ont profité et je regrette bien de n'avoir pas levé la main ! (photo Artcurial-Serge Cordey)
Rien à dire côté moto, cette Blériot 500 B20 est parfaite. Il vaut mieux car elle s'est vendue 65 k€ sur un ordre passé par internet.
Les formes du side-car de la Blériot vendue correspondent parfaitement à l'original, mais la caisse en petite lattes de bois est une refabrication (bien qu'un catalogue mentionne caisse en contreplaqué). (photo Artcurial-Serge Cordey)
Le débattement n'est pas bien grand, mais la Blériot possède quand même une suspension arrière. (photo Artcurial-Serge Cordey)
On connaît tous la Majestic dont on estime qu'il fut produit quelque 110 exemplaires dont 25 survivants sont recensés aujourd'hui. Celle-ci à châssis coque de 1931 partit à 68 k€. La voiture bleue derrière est la Rally de Georges Roy, constructeur des Majestic et New Motorcycle.
La Majestic valait 7500 F en juin 1930, mais pour l'option tableau de bord et éclairage, il fallait rajouter 1450 F.
Pour s'inscrire dans la coque de la Majestic, la pipe d'admission avait une curieuse forme coudée.
Le constructeur Georges Roy était très à l'honneur chez Artcurial avec sa voiture personnelle, une 1100 Rally très spéciale, une Majestic 350 et cette New Motorcycle 500 de 1929 adjugée à 26 k€. (photo Artcurial-Serge Cordey)
Deux Moto-Cardan ensemble, du jamais vu ! Cette unique bicylindre a maintenant un prix: 48 k€ (+ les 20% de frais habituels) et comme elle va chez un collectionneur connu qui expose souvent ses trésors, nous la reverrons bientôt..
Non, ce n'est pas Moto Guzzi qui a inventé le V twin face à la route, mais Clément Ader qui motorisa cette Moto-Cardan de 1904 à transmission acatène comme son nom l'indique.
La partie arrière du réservoir de la Moto-Cardan 250 cm3 monocylindre (vendue 34 k€) a sans doute servi de modèle pour recréer celle de la bicylindre que l'on entrevoit ici. Du beau travail dont personne ne se plaindra.
C'est la première Motocyclette (nom déposé) des frères Eugène et Michel Werner, une pièce d'histoire unique vendue 34 k€.
Aux côtés de la première version vedette de 1897, ces Werner de 1898 (à gauche) à volants externes style machine à coudre et de 1899 à volant interne, chutèrent respectivement sous le marteau à 16 k€ et 14 k€…
Belle affaire, cette Motorette Terrot à moteur ZL 2,5 HP et carburateur Longuemarre adjugée à 7000 €
Un bien beau jus pour cette Peugeot de 1920 avec son side-car Peuple à caisse en osier, vendue 24 500 €. (photo Artcurial-Serge Cordey)
Moteur entrainant directement la roue arrière comme sur la Georgia Knap, dans la roue avec Lumen, servant de tube arrière du cadre sur la Lamaudière-Labre, ou classique à la place du pédalier comme Werner l'a breveté, tout a été essayé et même le moteur en porte-à-faux arrière testé par Labitte sur cette ancestrale Pernoo qui remporta les 100 km d'un Étampes-Chartres en 1899.
Ouf ! La belle roue Lumen avec son petit moteur culbuté se vendit 11 500 € à un jeune collectionneur qui enchérit maintes fois sans que rien ne reste dans ses prix. La Georgia Knap de 1903 à droite partit à 27 k€. Cher car une autre Knap deux ans plus vieille n'atteignit que 10 k€. Serait-ce parce qu'elle n'avait pas de pneus ?
Il manque bien quelques éléments sur cette Landru à moteur Renouard, mais le célèbre Jean-Luc Gaignard a craqué (pour 19 k€ quand même). Bon plan, cela signifie qu'on la verra brûler les planches sans tarder.
Pour 48 k€ âprement discutés, ce tri Automoto à moteur maison de 1900 repartait avec vous. La belle 350 Dax est derrière.
Réunion jamais vue de deux tricylindres, Buchet de 1905 au premier plan à 47 k€ et Anzani de 1906 à à 70 k€. Elles émigrent vers l'Allemagne. (On rappelle pour mémoire qu'Anzani travailla chez Buchet avant de créer sa propre usine.)
Les deux petites Adolphe Clément (1902 à 1903) à moteur 145 cm3 culbuté partirent à 10 000 € chacune pour la Hollande.
Cette ABC 400 dans un jus exceptionnel, une des premières faites en France en 1920, s'échangea à 24 000 €. (photo Artcurial-Serge Cordey)
Les Sarolea 500 monotubes sont aussi belles que rares et côtées. Parfaitement d'origine, bien que son moteur soit une version route, celle-ci, forte du palmarès du coureur grenoblois Chevallier, se négocia à 47 k€. (photo Artcurial-Serge Cordey)
Artcurial a de quoi se frotter les mains avec 76 motos en majorité françaises et d’avant 1914 vendues pour un total de 2 042 000 € dont la Janoir 1920 en vedette à 145 000 €. Les visiteurs en punition Une vente tout à fait exceptionnelle, mais les pauvres visiteurs de Rétromobile étaient en revanche bien négligés. Il y [...]
Il faudrait un livre entier pour raconter l’histoire de toutes les créations hors normes de Victor, Albert Bouffort (1912-1995), mais le plus simple est de vous rendre à la prochaine édition de Rétromobile à la porte de Versailles à Paris du 8 au 12 février où seront exposées quelques-unes de ces réalisations les plus marquantes [...]