Top Mountain Museum : 60 000 visites !

Bientôt le printemps, l’été et les belles routes de montagne. C’est le moment de préparer vos prochaines balades et l’une des plus belles à faire, tant pour la route que pour la visite, est le Top Mountain Museum à Hochgurgl à 2170 mètres d’altitude. Il a réouvert cet hiver après le dramatique incendie qui l’avait totalement détruit en décembre 1921 et je l’ai visité en août dernier. Comme tout malheur a du bon, le musée qui enregistrait plus de 40 000 visiteurs par an avant l’incendie en a eu plus de 60 000 durant l’été et le printemps dernier, c’est un record et un effet collatéral de reportages parus dans le monde entier.

Le 18 janvier 2021 un incendie désastreux détruisait totalement le grand hall du Top Mountain Museum avec quelque 350 motos, uniques pour la plupart, totalement irrécupérables. Seules les 26 Indian d’une exposition spéciale dans le hall ont pu êttre sauvées.

Fantastique exploit !  La construction du nouveau batiment de 4500 m2 démarra quatre semaines seulement après l’incendie et la réouverture a eu lieu tout juste dix mois après, le 18 novembre 2022. Le secret de cette si rapide reconstruction est que la base de ce qui ne devait être qu’un agrandissement était déjà prête, les permis de construire déjà acceptés et les fondations préparées pour accueillir une nouvelle grande salle, un départ de la télécabine et la bureau de vente des tickets et forfaits. Ne restait plus qu’à construire au plus vite car, à plus de 2000 mètres d’altitude, la période ou cela est possible est bien courte. Le musée a réouvert en 2022 en même temps que la saison de ski.

Le nouveau musée vu du haut du télécabine.

La route

Comme souvent en Autriche, la route qui monte au col de Timmelsjoch est à péage (aller 15 €, A/R 21 €). Beaucoup de routes de montagne autrichiennes sont des routes à péage gérées par des institutions publiques. Ce n’est pas le cas de la Timmelsjochstrasse qui mène du village d’Hochgurgl au Top Mountain Cross point, cette route entièrement privée, appartient à la famille Scheiber, comme la station de ski et le musée et elle reste ouverte toute l’année.

Côté italien, le col change de nom, ce n’est plus le Timmelsjoch mais de col du Rombo, une route, anciennement militaire, qui, elle, n’est pas déneigée l’hiver.

Scheiber Alban Senior sur Porsche 356

Les jumeaux Alban et Attila naissent en 1965 d’un père coureur automobile. En 1973 ils ont 18 ans, une montagne, un hotel, une mini Montesa et déjà une belle passion pour la moto. L’idée d’un musée viendra d’une plaisanterie. Pourquoi ne pas faire un musée du trial ? Il y mettent une Bultaco et leurs motos de trial que vient ensuite rejoindre une Kawasaki 900 et quelques motos françaises. Et puis, il y a 15 ans de cela, une 750 S MV Agusta bleue, qui fut la seule moto du père des jumeaux. Ils n’ont quant à eux jamais vendu aucune de leurs montures et le musée, qui n’en est pas encore un, grandit ainsi naturellement en particulier avec des Indian qui seront leur grande passion et qu’ils utilisent d’ailleurs souvent. Le déclic viendra d’une rencontre avec Marc Upham, un concessionnaire autrichien d’Autriche du nord qui va leur prêter 150 motos. Le musée est né, accueille d’autres collections  et s’ouvre officiellement au public en avril 2016.

Histoire d’une idée en l’air

Comment donc peut-on avoir l’idée de construire un musée de motos au sommet d’une montagne à 2175 m d’altitude ?  Il faut pour en arriver là reprendre au tout début l’histoire de la famille Scheiber et qui mieux qu’Alban Scheiber, l’un des deux fils jumeaux d’Alban Scheiber senior, pouvait nous la raconter :  « Deux ou trois personnes venues ici pour faire de la marche se sont enthousiasmées sur la région : pas d’habitation, pas de routes, seulement de petites fermes. Le vieux Scheiber se dit alors qu’il ferait bien de construire un refuge en bois qui devient, vers 1889, le seul hotel de la vallée (c’est l’Edelweiss 4 étoiles d’aujourd’hui). Il a aussi l’idée de créer des pistes de ski ici, en haut du col et il réussit ensuite à racheter la route et à la privatiser ».

Attila et Alban Scheiber

Pourquoi eux et pas nous !

J’enrage ! Dans toute l’Europe, en Grande-Bretagne, en Allemagne, en Autriche, en Espagne, en Italie… On trouve de somptueux musées réunissant chacun des centaines de motos superbement présentées. Et quoi, chez nous, des musées vieillots, qui ne sont souvent ouverts que sur demande, et des collections privées, trop privées. Les dizaines de milliers de visiteurs qu’enregistrent annuellement les grands musées européens devraient pourtant faire réfléchir ! Et les propriétaires de nos musées ne sont pas les seuls responsables de cet état, car ils ne reçoivent aucune aide alors que, dans d’autres frontières, il y a souvent une participation, au moins dans la promotion, de l’état ou de la municipalité.

Les choses vont peut-être changer avec l’ouverture annoncée du nouveau musée de Lunéville, en espérant, enfin, une belle mise en valeur de notre patrimoine motocycliste national. En attendant nous n’avons vraiment rien qui arrive à la cheville des grands autres grands musées européens comme ce Top Mountain museum, avec ses 500 motos exposées dont 30 seulement appartiennent aux frères Alban et Attila Scheiber, les autres étant prêtées par de grands collectionneurs. Le musée connait depuis un phénoménal succès. Alors pas rentable un musée ? Comptez : 60 000 visiteurs x 15 €, plus le péage et la restauration… d’aucuns feraient bien de prendre exemple. Et, puisque nous ne fêtons guère notre propre histoire, profitons du fait que le Top Mountain museum et ses prêteurs sont très francophiles, ce qui permet d’y découvrir quelques 35 motos françaises.

Prêts pour un tour ?

La grande majorité des motos présentées ici sont décrites en détail dans les fiches. Cliquez sur les liens en bleu pour y accéder.

LES MOTOS FRANCAISES AU TOP MOUNTAIN MUSEUM

Les Avant-1914

Cocorico, c’est dans cette période que notre beau pays a le plus rayonné à l’international et la crème de notre production nationale est bien représentée à Hochgurgl.

Révolution : la Moto-Cardan de 1903 à moteur Ader de 479 cm3 est à la fois le premier bicylindre en V face à la route, 3 ans avant le très éphémère Archdeacon entraîné par un V twin Buchet et une hélice en 1906, et 20 ans avant la belge Spring de 1920 ou la belle tchèque Walter 750 de 1923 qui ont, en revanche, une transmission secondaire par chaîne.

Une autre timide et unique tentative de V twin face à la route à transmission par arbre a lieu en Grande-Bretagne en 1921 avec la 980 cm3 Duncan, mais ce n’est que 50 ans après la Moto-Cardan, en 1953, que sortira en grande série une autre moto à moteur en V face à la route et transmission acatène, la Victoria 350 Bergmeister , Indian s’essaie brièvement à cette disposition avec sa 750 modèle 841 en 1943, puis  Lilac au Japon à partir de 1959 et enfin, la plus célèbre des V twin face à la route, Moto-Guzzi qui débute avec sa V7 en 1968. Rachetée en 2018 à la vente de la collection Guélon à Paris, cette Moto-Cardan bicylindre, est désormais en parfait état de marche.

Le bicylindre face à la route de la Moto-Cardan, signé par les Ateliers Clément Ader.

Et la moto-Cardan n’est pas la seule vedette des premiers âges de la moto. –3 : Adolphe Clément 150 cm3 de 1903. -4 : La très confidentielle moto La Foudre à moteur Buchet de 1902 ou 3. -5 : Buchet 1000 course bicylindre en V de 1905 probablement sous la marque Alcyon. -6 : Magnat-Debon 330 cm3 de 1906 à culasse borgne et admission automatique. -7 : Alcyon 1446 cm3 de 1906 avec le trois cylindres Anzani en étoile. -8 : Magnat-Debon 400 cm3 type Aviation  à soupapes culbutées.  -9 : Magnat-Debon 500 bicylindre en V de 4 HP en 1914.

Les années 20

On les appelle les années folles, et les motos exposées sur le podium central ne démentent pas ce qualificatif quel que soit leur pays ! D’avant en arrière, une Wilkinson  TMC 876 cm3 quatre cylindres à refroidissement liquide de 1913, une Majestic 350 à moteur Chaise de 1930 et une Mégola 640 cm3 Touren à 5 cylindres en étoile de 1922.

-2 : Magnat-Debon 400 cm3  à boîte 3 vitesses de 1924,. -3 : Koehler Escoffier 500 cm3 Mandoline 1924. –4 : la Magnat-Debon de 1924, encore,. -5 : Une Motobécane 175 type MB1 pour dames ou ecclésiastique de 1924 (une version homme est juste derrière) et une Terrot 175 L de la même année devant une autre Motobécane un peu plus récente, -6 : La fameuse moto en bois de Charron de 1939 et son curieux moteur Voisin (pas Gabriel) dont le blog vous a déjà parlé longuement. -7 : La New Motorcycle à moteur Chaise 350 cm3 de 1929.

Les années 30

New Map 500 BYS 5 de 1937, certes demi-Suisse avec son moteur MAG rebadgé, mais néanmoins à compter parmi les belles françaises.

Les années 30 sont un âge d’or pour la moto, en France comme ailleurs, et le Top Mountain museum rend un bel hommage à nos productions nationales avec plus de dix modèles.

 

New Map 500 IC9 1931, certes demi-Suisse avec son très rare moteur MAG type 422 Super Sport, mais néanmoins à compter parmi les belles françaises.

1 : On connaît la marque Train pour ses moteurs et beaucoup moins pour ses motos complètes comme cette 350 cm3 M7-800 de 11ch en 1929. -2 : CP Roléo 350 moteur Staub 1929, une belle représentante des tendances de son époque avec son bloc moteur et son cadre en tôle emboutie. -3 : Jonghi 350 cm3 TJ4 de 1932, l’un de nos plus beaux monocylindres sportifs. -4 : Peugeot 1932-175 cm3 P109 ou 220 cm3 P110. Des jumelles à tout faire. -5 : Les New Map étaient fabriquées à Lyon par les établissements Paul Martin, et ce dernier vendit également des motos sous son propre nom. En voici un bel exemple avec cette  Paul Martin 500 ZS5 de1935 . -6 : Alcyon 350 type 306A de 1936, à bloc-moteur Zürcher. -7 : Gnome Rhône 750 X de 1939, la grosse cylindrée française sportive. -8 : Monet Goyon 350 LS4 1936. Les très élégantes 350 LS4 et LS5 étaient équipées de moteurs maison dus au talentueux Raymond Guiguet -9 : MGC 350 Chaise 1939. Un des derniers modèles vendus par MGC, curieusement équipé pour cette moto chère et luxueuse, par un très placide moteur Chaise de 350 cm3.

Des années 40 à nos jours

Même en aimant beaucoup les motos françaises, il faut bien reconnaître que l’après-guerre est plus pauvre que l’avant, et c’est une euphémisme ! Le Top Mountain Museum réussit toutefois à donner une idée de notre évolution motocycliste, des utilitaires des années 40-50 aux originalités techniques en course des années 80 et mon petit doigt me susurre que l’exposition pourrait bien s’enrichir bientôt dans ce dernier domaine.

1: La plus célèbre et la plus répandue des motos françaises de l’immédiat après-guerre, la Motobécane 125 D45 lancée au début de 1946 et ici dans sa mouture S de 1949. -2 : Du côté de Mâcon, Monet Goyon riposte avec cette 125 M6V de 1954 ici dans sa version la plus utilitaire sans suspension arrière. -3 : La plus grosse concurrence,ce viendra de Dijon avec la longue série des Terrot 125 dont cette ETD de 1955 est une des premières versions.

-4 : Un grand saut de le temps avec cette ELF-e d’endurance à moteur Honda 1000 cm3 quatre cylindres. -5 : On reste toujours plus étonné par la 500 Elf 2 surnommée le cyclorameur par certains, et animée par un moteur 500 cm3 Honda d’usine à trois cylindres.


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7 commentaires sur “Top Mountain Museum : 60 000 visites !

  1. fmd dit :

    C’est vrai que nous avons aussi de très beaux musées en France dont celui de Marseille, mais aucun ne rivalise en taille, en nombre de motos et en modernité de présentation avec ceux que l’on trouve dans la majorité des autres pays européens, Allemagne, Angleterre, Italie et Espagne. J’en suis le premier désolé et le fameux musée de Lunéville promis nous fait bien attendre.

  2. Gilles dit :

    Bonjour, nous avons aussi un très beau musée moto en France, celui de Marseille que j’encourage ceux qui ne connaissent pas à visiter

  3. jaravel eric dit :

    Bonjour François MD, il faut juste espérer que ce nouveau bâtiment ne prendra pas feu à nouveau et que tout a été bien conçu afin d’éviter une nouvelle perte catastrophique d’un tel patrimoine, sans parler du travail colossal effectué par de vrais passionnés pour remettre en état ces belles mécaniques …..
    bonne continuation
    Eric

  4. lafleur dit :

    Bonjour FMD,
    l’immatriculation de la MGC à moteur Chaise date du 26 juin 1934 et a pour numéro de cadre 535.
    Elle a été immatriculée ensuite le 8 août 1939 sous la même immatriculation puis avec le numéro 833 FH 38 le 3 janvier 1957 et deviendra la propriété d’une grande collection allemande.
    Cordialement

  5. jackymoto dit :

    Ben un musée, c’est bien et c’est pas bien, un peu comme les expos diverses. Une moto c’est d’abord fait pour rouler et le public est trés intéressé quand on fait tourner des avant 14, peu spectaculaires à l’arrêt. Ben oui, quand on voit le musée de Glasgow, de Neckarsulm ou de Prague, on fait de sacrées découvertes…chez Guy à Riom il y a beaucoup de belles choses aussi et il a l’avantage d’être central par rapport à Lunéville où je ne suis jamais passé malgré de nombreux voyages vers le nord de l’ Europe (et je m’arrête systématiquement au musée du vélo de Nijmegen). Depuis que je m’intéresse aux véhicules anciens , j’ai tout de même vu trois musées brûler et ça fait quand même beaucoup pour les concentrations de raretés…Ça me fait une drôle d’impression de voir des motos de collectionneurs maintenant décédés.

  6. fmd dit :

    Oui, je sais, un beau musée coute cher, mais il amène aussi des visiteurs, c’est pour cela que j’ai publié les chiffres du Top Mountain museum : 60 000 visiteurs/an à 15 € plus les dépenses annexes, et c’est presque pareil pour le Neckarsulm museum (40 000 visiteurs si ma mémoire est bonne) et c’est aussi dans la même zone pour les musées espagnols et britanniques.

  7. François Arsène dit :

    En novembre il y a eu une expo spontanée de centaines de motos sur le trottoir du Parc Floral de Vincennes mais la municipalité l’a dispersée …
    Oui, je sais, c’est de l’humour caustique ! Plus sérieusement, il y a en France de remarquables collections privées connues des seuls initiés. Les réunir supposerait un lieu adapté permanent et une organisation structurée lourde. Cela a un prix et demanderait une volonté politique en plus de convaincre les propriétaires. Beaucoup de travail et d’obstacles en perspective …. Espérons l’ouverture prochaine du musée de Lunéville qui pourrait faire école.