Tonale, une petite Italienne bien banale, pensez-vous. Fausse pioche, sous ses airs bien sages, se cache un tempérament de feu et une glorieuse ascendance. Elle est en effet la dernière création chez Bianchi de Sandro Colombo, par ailleurs grand patron technique du département course, qu'il va quitter cette même année 1955 où sort la Tonale. La moto est en train de quitter son âge d'or pour rentrer dans la pire crise qu'elle ait jamais connue.

Le haut de gamme de Bianchi est la Tonale à simple ACT conçue par l'ingénieur Sandro Colombo, l'une des plus homogènes Italiennes de l'après-guerre. Le modèle est, dès ses débuts, doublé par des versions sportives en 175 et 250 cm3 et sa base servira aussi plus tard à Lino Tonti pour développer ses 175 et 250 de motocross.

En revanche, tout va bien pour le vélo, Bianchi a été porté aux nues avec ses multiples victoires de Fausto Coppi, champion d'Italie de 1940 à 42, de 47 à 48 et en 55 vainqueur du tour d'Italie en 1940, 47, 49 52 et 53, … du Paris-Roubaix en 50, records de vitesse et Tour de France en 1949 et 52, etc.,  jusqu'en 57.

Seules ces ventes de vélos sont là pour couvrir les pertes colossales des autres départements. Une collaboration a débuté avec l'ingénieur bolognais Alfonso Drusiani, mais son projet de 125 course double arbre n'est pas retenu par la direction. Colombo devient chef du département compétition en 1954 tout en continuant à superviser la production standard. On lui devra cette 175 Tonale Turismo, dont seront dérivés un certain nombre de versions course en 175 et 220 cm3 et le bientôt célèbre DV 220. Cette dernières troquait sa chaîne d'entrainement du simple ACT pour trois pignons qu'on devinait sous les bossages de la distribution d'où le surnom de" trois boutons" de cette DV 220. Au guidon de la 175 en version cross, plus tard portée à 200 cm3, trois pilotes remportèrent nombre de victoires dans le championnat italien. Citons encore les victoires d'Osvaldo Perfetti au Tour d'Italie sur une 175 standard et Franzosi au Milan-Tarente tandis qu'une version spéciale de 16 ch à cadre rallongé et carénage aérodynamique développée par l'ingénieur Nardi, atteignait 205 km/h à Monza en novembre 1957.

Le génie de Colombo ne suffit pourtant pas à contrer la crise. Un accord signé entre Bianchi, Fiat et Pirelli le 11 janvier 1955 donne naissance à Autobianchi. Les autres départements sont durement affectés et, en 1958, pour remplacer Colombo, Bianchi engage Lino Tonti pour s'occuper de la compétition et du reste de la gamme.