Après l'échec relatif de leurs bicylindres à plat, de la Star de 1921 à la M24 de 1923 à 24, l'usine allemande de Berlin-Spandau change de stratégie et crée un nouveau modèle plus simple, toujours axé sur la robustesse et le confort, mais proposé cette fois à un prix très concurrentiel, c'est la R0/4 qui est présentée en 1924 en trois versions. La EZ, première mise sur le marché avec un éclairage électrique et une batterie, la K avec un phare à acétylène, et la D, variante avec side-car de la EZ. 

Le succès est cette fois au rendez-vous, tous les éléments de la moto sont fabriqués en interne et l'usine berlinoise tourne à plein régime avec une production de 25 à 30 motos par jour.  Entre 1924 et 1927, date de sortie de l'ultime mouture R0/5, il est produit 24 500 exemplaires de ces monocylindres. Vite réputée pour sa grande fiabilité, cette bête de somme, lourde, mais indestructible, s'illustre avec de grands raids autour du monde, d'Allemagne en Chine en 1926 ou de la porte Brandebourg aux pyramides d'Égypte.

La simplicité de la R0/4 n'exclut pas la modernité. La boîte 3 vitesses est intégrée au bloc moteur superbement lisse et les soupapes latérales sont totalement encloses. La lubrification est aussi parfaitement étudiée avec une pompe à palette et un piston de graissage additionnel sur le réservoir. Forte d'une dizaine de chevaux, elle dépassait les 90 km/h. Rien à redire non plus sur son cadre double berceau rigide, mais sa suspension sautillante, à roue tirée appuyée sur les longues lames de ressort au-dessus de la roue, avant la fit surnommer Spandau Springbock, Bock étant une petite colline à proximité de l'usine. Le seul gros point faible était le frein arrière à patin sur jante totalement inefficace, a fortiori sous la pluie.

Une version sportive, la R1/4, arrive aussi en 1924 et sera produite, comme la R0/4, jusqu'en 1927. Le piston quitte la fonte pour l'aluminium et elle revendique 12 ch et 100 km/h. Sa fourche avant est allégée, elle a un réservoir d'huile supplémentaire dans le réservoir de carburant, un carburateur Brown & Barlow type120 et le levier de vitesse sur le réservoir de la R0/4 est remplacé par un levier direct planté sur la boîte. 

Tout change en 1927 avec l'arrivée à la direction technique de Martin Stolle qui travaillait auparavant chez Victoria et BMW. Il crée cette même année la R0/5, qui ne diffère que par des détails, lames de ressort de la suspension plus courtes et nouveau réservoir.

La grosse faiblesse du frein arrière à patin sur jante n'est corrigée qu'en 1928 avec la R0/6 qui adopte enfin un tambour classique à mâchoires de frein internes. Son refroidissement a aussi été amélioré avec des ailettes plus grandes et un graissage pression. Elle annonce 12 ch et bat des records de ventes avec 10 000 exemplaires produits. En 1928 on dénombrait 100 marques de moto dans le grand Berlin et une moto sur cinq était une D-Rad. L'année suivante, sort la R9 qui se vendra à 9000 exemplaires. Elle utilise le même bloc moteur, mais cette fois un cylindre incliné vers l'avant et un réservoir en selle sur la version de luxe, pour commencer puis sur la R9 standard. 

Cette superbe R0/4 est photographiée à Llanera (Espagne) dans la Collection Enrique Castells.