Didier Jillet
1200 cm3 DJ1200 - 1980
Une tentative de moto d'endurance innovante et française à 100 %
Dans les années 70-80, la France a toujours fort peu de constructeurs, en revanche, notre pays est l'un des plus prolifiques en artisans et inventeurs de talent. On se souvient des motos de course d'Alain Chevallier et de Claude Fior, des Elf de de Cortanze, des coques de Bernard Droulhiole, des JBB de Jean-Bertrand Bruneau, des side-cars et de la Benelli 900 de Philippe Moch, des multiples réalisations dÉric Offenstadt, de la BFG de Gérard Curey, des 2x2 des frères Savard
et de Didier Jillet avec sa DJ 1200 à moteur Peugeot qu'il a lui-même conçue et construite en 1979-80 : une machine innovante et française à 100%.
L'ancien mécano réalise son rêve
Mécano chez Jean Murit, puis concessionnaire Kawasaki à Dieppe, Didier quitte les métiers de la moto en 1977, mais il conserve le rêve de produire sa propre moto d'endurance entièrement française. Fabriquer seul sa moto de A à Z n'est déjà pas une uvre facile, mais si, en plus, elle empile les nouvelles solutions techniques, la gageure est quasi irréalisable.
Didier est parti sur le choix du moteur Peugeot 4 cylindres de 1130 cm3 qui a fait ses preuves sur les 204. C'est une mécanique compacte, moderne et sans doute la plus adaptée sur le marché pour un usage motocycliste. Comme il s'agit d'un bloc-moteur intégrant la boite, il sera utilisé comme élément porteur et, les cylindres étant basculés à plat comme sur les BMW série K, Didier Jillet a dû réaliser un carter d'huile sous le moteur. La mécanique est retravaillée pour délivrer environ 100 chevaux et la boite est modifiée avec un barillet spécifique, un nouvel arbre primaire et les pignons nécessaires pour loger 6 rapports dans le carter d'origine.
Une partie cycle novatrice à 100 %
Voilà pour moteur et ce qui représente déjà un énorme travail d'adaptation et pourtant, Didier Jillet va se donner encore plus de mal pour la partie cycle. La gosse innovation est sa suspension, dûment brevetée en mai 1977, un système triangulé d'inspiration très automobile avec deux bras réalisés en caissons de tôle d'acier inox qui n'est pas sans rappeler la Elf concue par de Cortanze. Elf aurait dit-on négocié certains droits d'utilisation avec Didier Jillet. Ce dispositif promet un excellent compromis confort-tenue de route et des freinages sans plongée de l'avant. L'expérience montera toutefois, comme chez Elf, JBB et Yamaha avec sa GTS, que le compromis entre stabilité et maniabilité est particulièrement délicat à définir et, comme avec tous les nouveaux systèmes, nécessite de longues expérimentations...peu compatibles avec le budget d'un constructeur solitaire
Les roues en alliage, réalisées spécialement, sont à moyeu déporté. Le disque du frein avant de très grand diamètre est périphérique (comme sur certaines Buell) et celui de l'arrière est ventilé et placé en sortie de boite. Un carter de chaîne en aluminium taillé dans la masse sert de monobras de suspension tandis qu'une superstructure légère en aluminium supporte le radiateur, les monoamortisseurs de Carbon avant et arrière et la colonne de la direction qui commande par des biellettes tirées la roue montée sur un moyeu articulé.
Les innovations sont nombreuses sur cette DJ, sans doute trop à la fois d'ailleurs. On admire la réalisation faite par un seul homme avec ses propres moyens, et son fourmillement d'idées novatrices, mais avec tant de paramètres inconnus à gérer l'entreprise ne pouvait réussir. La DJ a néanmoins prouvé son potentiel.
Moteur Peugeot 4 cylindres 4 temps à refroidissement liquide en ligne et à plat - 1130 cm3 (75 x 64 mm) - env. 100 ch/7500 tr/min - Simple ACT et 2 soupapes par cylindre - Allumage batterie/bobines - Lubrification sous pression, carter humide et pompe trochoïde - 2 carburateurs Weber double corps verticaux ø 40 mm - Bloc moteur-boîte 6 rapports, sélecteur à droite - Embrayage Sachs monodisque à sec - Transmission finale par chaîne sous carter étanche - Moteur porteur et superstructure en aluminium supportant les suspension avant et arrière et la colonne de la direction par biellettes - Suspension avant à parallélogramme par deux bras du côté droit et amortisseur de Carbon, débt 160 mm - Suspension arrière monobras-carter de chaine en aluminium, amortisseur de Carbon - Freins avant à disque périphériques ø 450 mm fixé sur la jante, étrier double piston sur la platine supportant l'axe de roue - Frein arrière simple disque ventilé en sortie de boite - Roues alliage ø 18" à moyeux déportés - Empattement 1505 mm - Réservoir 24 l, huile 7 l - Poids à sec 224 kg, tous pleins faits 261 kg - 270 km/h.
La gageure était top difficile et la DJ 1200 n'a pas passé les essais préliminaires du Bol d'Or en 1980, faute de temps pour parfaire sa mise au point. Avec tant de paramètres nouveaux à gérer, l'entreprise ne pouvait réussir. La DJ a néanmoins prouvé son potentiel.