David Stanger, propriétaire d'une société d'ingénierie à Tottenham au nord-est de Londres, s'intéresse aux moteurs à combustion interne dès 1897. Il construit sa première automobile en 1901 puis se passionne pour l'aéromodélisme dont il est un des pionniers et réalise un certain nombre de moteurs pour des modèles réduits d'avions entre 1908 et 1925.

Stanger Engine Co. présente au salon Olympia de Londres fin 1919, un moteur deux temps bicylindre en V à 45° de 539 cm3, qu'il a l'intention de vendre à des constructeurs de motos ; hélas, aucun n'est séduit ! Les deux temps de grosse cylindrée sont alors considérés comme complexes et trop chers à réaliser. Stanger décide donc de fabriquer sa propre moto dont il construira un nombre très limité d'exemplaires de 1921 à 1923 avant de se consacrer à de nouvelles activités.

Il est vrai que la réalisation d'un tel bicylindre deux temps est à l'époque un véritable défi technologique que seul Alfred Angus Scott a su relever de façon très efficace avec ses bicylindres parallèles dès 1908. Il est déjà compliqué, à cette époque, d'obtenir l'étanchéité nécessaire autour du vilebrequin d'un monocylindre deux-temps, alors, réaliser une étanchéité parfaite pour séparer les carters moteur d'un bicylindre semble mission impossible. Comme Scott, Stanger y réussit pourtant et son bicylindre en V, un deux-temps classique à trois transferts, fonctionne tout à fait correctement. Il est, sauf erreur de ma part, le premier bicylindre en V deux temps de l'histoire et l'un des premiers deux temps de plus de 500 cm3, mais il fut précédé, en 1913, par la Schickel américaine, un colossal monocylindre de 695 cm3. Le carter moteur en aluminium à plan de joint horizontal est divisé en deux par une cloison centrale ; le palier milieu reçoit une bague formant joint de compression et les deux extrémités du vilebrequin monobloc tournent sur des double roulements à billes avec des bagues d'étanchéité. Les bielles sont en acier sur bague bronze dans le piston tandis que la tête de bielle est sur aiguilles. Pour le montage on enfile la bielle sur le vilebrequin monobloc puis on insère les aiguilles, retenues par des demi-rondelles cémentées. 

Le moteur est classiquement accouplé à une boîte de vitesses Sturmey-Archer avec une transmission par courroie dans un premier temps, remplacée par une chaîne, en 1923.

Comme si une telle innovation sur la mécanique ne lui suffisait pas, Stanger a aussi doté sa moto d'une étonnante suspension intégrale. Si l'avant est plutôt classique avec sa fourche pendulaire appuyée sur un ressort hélicoïdal, l'arrière est tout à fait original avec l'axe de roue arrière, en bout du triangle du cadre, monté sur une bielle en L qui, par l'intermédiaire d'un long tirant, fait travailler des ressorts à lames disposés verticalement sous le tube de selle.